Zéro Dark Thirty retrace une chasse à l’homme mondiale : la traque d’Oussama Ben Laden, chef du réseau jihadiste Al-Qaida, ayant  revendiqué sa responsabilité dans les attentats du 11 septembre. Aujourd’hui le film fait polémique : apologie de la torture ou reconstitution de la réalité ? Les spectateurs s’opposent.

Affiche Zero Dark Thirty

 
Zéro Dark Thirty
met en avant les séances de torture infligées à des prisonniers afin de leur soutirer des informations sur l’homme le plus recherché de l’époque : Oussama Ben Laden. Lavie.fr parle de « la possible conclusion qu’induirait Zero Dark Thirty : sans la torture – aussi détestable soit-elle – jamais le leader d’Al-Qaida n’aurait pu être mis hors d’état de nuire ». L’utilisation de la torture montrée comme inévitable et essentielle pour arriver à ses fins dérange.

Parmi les dernières réactions suscitées, on peut lire des comparaisons de Kathryn Bigelow à Leni Riefenstahl, réalisatrice phare du régime nazi. Naomi Wolf, auteure et consultante politique américaine, fait le parallèle dans un article du Guardian : « Pour moi, le tournant qu’a pris votre carrière me fait désormais penser à celle d’une autre réalisatrice pionnière du cinéma qui devint une apologiste du mal : Leni Riefenstahl ».

La réalité serait autre. La CIA aurait employé des méthodes bien plus classiques pour arriver à ses fins : pots-de-vin, espionnage traditionnel et surveillance électronique… Mark Boal, scénariste, aurait donc transformé la réalité en un pur « entertainement », un film haletant occultant la dimension politique de l’affaire.

« Une partie de l’histoire… »

Kathryn Bigelow, réalisatrice, se défend de ces accusations dans une tribune au Los Angeles Times : « La torture, comme nous le savons tous, a été employée durant les premières années de la traque. Cela ne veut pas dire que cela a été la clé menant à Ben Laden. Cela veut dire que c’est une partie de l’histoire que nous ne pouvons pas ignorer ».

Le film vient de remporter cinq nominations pour la cérémonie des oscars du 24 février prochain. La guerre est lancée entre les concurrents, et cette polémique pourrait être un moyen d’abattre l’œuvre de Kathryn Bigelow…


Zero Dark Thirty – HD Trailer #1 VOSTFR par PixAgain

[toggle title= »Critique du film par Francisco Barranquero »]

Ça commence très fort : à l’image, tout de suite, la torture. Les gestes les plus pratiqués grâce auxquels la CIA obtenait ses informations. A partir de là, le film se déroule, la narration est rythmé, intense. Mais sans manièrees, sans effets superflus,si habituels dans le cinéma américain. On suit l’enquête, essentiellement à travers le regard d’une investigatrice de la CIA nommée Maya. La réalisatrice, Katerine Bigelow, explique avec rigueur ce qui s’est passé ou pour être plus juste, ce qu’elle sait de ce qui s’est passé. Car si le film retrace précisément les chemins qui ont mené au terroriste, il reste de nombreux doutes sur la mort d’Ousama Ben Laden. Ce point de vue cinématographique fait la force de l’oeuvre: loin de l’image d’efficacité rationnelle de la CIA, le film montre les erreurs, les échecs qui finalement conduisent au succès, presque par hasard, de la plus des agences de renseignement.

Mais le courage de Katerine Bigelow en reste là. Elle laisse au public la responsabilité de juger les faits . Elle se contente de montrer. Elle s’en lave les mains. Le film n’est pas aussi courageux qu’il pourrait l’être. Parce que parler des tortures après Abu Grayb et George Bush n’est pas un exploit. Parce que le rôle de la Maison-blanche est dilué. Parce qu’elle n’ouvre pas de chemins directs vers l’existence d’autres solutions au problème Ben Laden. Pas plus qu’elle ne remet en cause la légalité de l’assassinat. Tout cela, à cause de la nécessité pour les Américains d’avoir leur héros ; celui qui incarne les grandeurs plus que les petitesses de la nation nord-américaine. Jessica Chastain, l’héroïne du film et candidate à l’Oscar à Hollywood, supporte tout le poids du film, de la recherche à l’exécution du terroriste le plus recherché du monde. Trop simple. Trop Darkness.

Il y a des parallélismes entre certains films qui analysent des événements majeurs de l’histoire américaine et qui finalement racontent ce que tout le monde sait. Les hommes du président ne montrait qu’une source avec des envies de parler. Zero Dark Thirty n’est plus qu’une confusion avec un cadavre. Trop simple. Trop peu engagé.[/toggle]