Marie Linarès, 46 ans, vit depuis 12 ans avec la sclérose en plaque. Cette maladie qui touche le système nerveux l’invalide et réduit ses capacités physiques. Pourtant, malgré son handicap, elle reste positive et vit à fond sans se plaindre. Pour elle, « la vie est trop belle pour la gâcher ».

La démarche est prudente mais volontaire. Les gestes précis et appliqués mais en même temps dynamiques. Les blagues fusent, le sourire toujours accroché aux lèvres. Lorsque l’on rencontre Marie Linarès, on peut se douter que quelque chose cloche. Mais on n’y fait pas attention, on ne s’attarde pas sur « l’anormal ». Sa famille est pareille. Saturnino, son mari a le cœur sur la main, Lisa, 18 ans se permet de faire des blagues sur les personnes handicapées. « Mes amis ne comprennent pas comment j’arrive à rigoler de cela vu la situation de ma mère. Mais justement, je suis la mieux placée pour le faire ».

« La situation » de Marie, c’est la maladie. Depuis 12 ans maintenant, elle est atteinte de la sclérose en plaques et son mode de vie en a été totalement chamboulé.

Stoppée du jour au lendemain

La nouvelle tombe le 9 mai 2003. « J’étais très fatiguée, j’avais du mal à marcher. Je n’arrivais pas à tenir des objets ; il y a même une fois où je suis tombée. C’est à ce moment-là que je me suis dis que c’était grave. J’ai donc consulté un ostéopathe puis un neurologue ». Ce dernier lui conseille d’aller à l’hôpital. Après plusieurs examens, le verdict tombe : Marie est atteinte de la sclérose en plaques.

Pourtant, elle et son mari ne prennent pas tout de suite conscience de la gravité de la maladie. « J’étais dans le déni le plus total. Je me sentais bien, pas malade du tout. Et surtout j’étais loin de penser que j’allais devoir arrêter de travailler ». Le plus dur pour Marie. Directrice d’un salon de coiffure près d’Annecy, elle se donnait à 300% dans sa passion qui s’est vu stoppée du jour au lendemain.

« Après deux semaines à l’hôpital, je suis rentrée chez moi. C’est là que je me suis rendu compte que j’étais malade ». La sclérose en plaques fatigue Marie. Le moindre effort l’épuise. « Toutes les petites choses de la vie quotidienne comme faire les courses, la cuisine ou le ménage m’affaiblissent beaucoup. Par exemple, je coupe les cheveux de mon mari cinq minutes, après je n’en peux plus, je ne peux plus rien faire ».

« Je déteste faire la malade »

Malgré cela, Marie s’est « adaptée », comme elle dit. Surtout, elle a toujours gardé son sens de l’humour. « Je déconne tout le temps, je fais la con pour masquer ma détresse ; je m’en sors tellement bien par rapport à d’autres ». La sclérose en plaques atteint les personnes de manière différente. Certaines ne peuvent plus marcher et sont en fauteuil, d’autres perdent la vue ou ne peuvent même plus parler, et parfois comme Marie, leurs jambes peuvent encore les soulever.

« Je peux tout faire mais moins bien. Mon mari et mes filles montent l’escalier pour rentrer chez nous en deux minutes. Moi, je vais le faire en cinq minutes mais j’y arrive. Et c’est ça qui est important ». Une force de caractère et un goût pour la vie qui l’empêche de se plaindre. « Je déteste faire la malade. Je ne veux quasiment jamais demander de l’aide. J’ai peur d’embêter les gens et de traumatiser mon entourage, surtout mes filles ».

Un entourage qui lui est précieux. Ses parents l’aident beaucoup au quotidien. Saturnino également, même si tout n’a pas toujours été facile : « C’est un choc lorsque l’on apprend que sa femme est malade mais après on s’est adapté et aujourd’hui pour nous, la maladie est normale. On vit avec ». Lorsqu’ils vont faire les courses ou du shopping, Marie se déplace en fauteuil roulant pour moins se fatiguer. La famille a aussi investi dans une voiture avec boîte de vitesse automatique parce qu’elle n’a plus les réflexes pour appuyer sur les pédales. Des détails non visibles pour les amis du couple mais qui facilite la vie de Marie.

Un leitmotiv : relativiser

A ce stade de la maladie, les patients comme Marie sont invalides mais continuent à vivre de manière quasiment normale. Une fois par semaine depuis 2004, elle doit faire une piqûre qui atténue les crises de la maladie. « Avec ce traitement, il y a des effets secondaires. J’ai de la fièvre et je ne suis pas bien pendant une journée mais le lendemain tout va mieux. ».

Marie marche mais ses jambes se fatiguent de plus en plus vite. Sa vue commence aussi à baisser, elle a plus de mal à déglutir lorsqu’elle mange et plus de mal à parler. « J’ai aussi des absences, j’ai du mal à me concentrer durant plusieurs minutes, j’ai même des pertes de mémoire. Quelques fois, on me pose une question et je dois faire répéter parce que je ne comprends pas ».

Pour éviter que son état ne se dégrade, Marie voit régulièrement un psychiatre, un orthophoniste, un orthopédiste et un ergothérapeute. Elle voit même un psychologue depuis 4-5 ans. « Au début, j’étais réticente à faire cela mais aujourd’hui ça me fait énormément de bien. Lorsque je vais chez le psy, je lui parle de tout et ça va. Je pleure moins qu’avant par exemple ».

Tous les mois de novembre, Marie retrouve d’autres personnes atteintes de sclérose en plaques dans un centre spécialisé près de Lyon. Certaines sont devenues ces amis : « Là-bas, on est solidaires. Les médecins et les spécialistes s’occupent de nous en permanence et nous font énormément de bien. La première année, j’ai eu peur parce que beaucoup de gens sont gravement atteints par la maladie. Et je ne voulais pas me retrouver avec eux. Mais c’est dans ce centre que j’ai appris à relativiser et maintenant j’y vais avec plaisir. Je suis même la mascotte, je dis des conneries comme d’habitude et ça détend l’atmosphère ».

Une nouvelle preuve que même face à cette maladie, Marie regarde toujours le bon côté. « Lorsque quelque chose ne va pas bien, on se dit qu’il y a des problèmes plus grave dans la vie », conclut-elle.

[toggle title= »Qu’est ce que la sclérose en plaques? »]

La sclérose en plaques est une maladie détruisant la myéline, une substance protégeant le système nerveux. Elle se déclare généralement suite à de grandes périodes de stress ou à un choc émotionnel. Lors d’une IRM, le patient peut voir apparaître des taches blanches au niveau du cerveau et de la moelle épinière, d’où le nom de « plaques ».
Cette maladie est méconnue du grand public du fait de sa complexité et des symptômes différents se déclarant sur chaque personne. Dans le cas de Marie, la maladie a d’abord touché les jambes. Chez d’autres, elle se déclare au niveau des bras, des yeux ou encore de la bouche.
L’état d’une personne se dégrade suite à des crises qui lui touchent une partie du corps. Mais la sclérose en plaques est différente suivant les personnes : certaines n’auront pas de crises pendant des années et vivront quasiment normalement toute leur vie, d’autres vont avoir des crises fréquentes et leur état va empirer assez vite.
C’est cette complexité de la maladie qui rend le travail des chercheurs difficile. Des traitements permettent d’atténuer les crises, mais aucun vaccin n’existe à ce jour. Pourtant malgré son caractère incurable, la sclérose en plaques n’est pas mortelle, elle est invalidante.

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