En Russie, depuis l’invasion en Ukraine le 24 février 2022, les entraves à la liberté d’expression s’intensifient, mettant en péril les journalistes indépendants et les médias critiques et plongeant le pays dans une censure totale. La solution : l’exil.

Le meurtre tragique de la journaliste et opposante au régime de Poutine, Anna Politkovskaia en 2006, reste un symbole des dangers encourus par ceux qui osent remettre en question le pouvoir en place. Chaque année, Reporters sans frontière publie un classement des pays selon leur respect de la liberté de la presse. Cette année, la Russie se situe à la 164ème place sur 180 pays, poursuivant sa dégringolade. 

Les ravages de la censure post-invasion

Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022, la liberté des médias, déjà mise à mal, a atteint des niveaux d’oppression sans précédent. De nombreux médias indépendants ont été contraints à la fermeture, à la censure, ou ont été étiquetés comme « agents de l’étranger ». Les journalistes refusant de se conformer aux directives gouvernementales risquent des peines sévères, pouvant aller jusqu’à 15 ans d’emprisonnement. Toute personne utilisant des termes tels que « guerre » ou « invasion » est soumise à la censure.

Des médias très populaires, comme Novaia Gazeta, pilier du journalisme d’investigation en Russie, ont vu leur site internet bloqué. De nombreuses rédactions ont été contraintes de se délocaliser à l’étranger pour préserver leur liberté éditoriale, car les autorités réduisent au silence toute voix dissidente.

Valeria Ratnikova, une journaliste en exil

Dans ce climat pesant, de nombreux journalistes, à l’instar de Valeria Ratnikova, se battent pour défendre la vérité et la liberté de la presse malgré les dangers encourus. Valeria, journaliste pour le média indépendant TV Rain, a vu la chaîne de télévision bloquée au lendemain de l’invasion russe. « C’est pour cette raison que nous avons quitté le pays six jours après le début de la guerre. Nous nous sommes rendues en Turquie dans l’espoir d’obtenir un visa, puis nous avons passé quatre mois en Géorgie et travaillé pendant un an à Riga en Lettonie », raconte la jeune femme. 

Aujourd’hui, Valeria et son équipe ont des locaux à Amsterdam, et travaillent depuis la capitale hollandaise. Leur chaîne étant bloquée, ils diffusent leurs émissions sur leur compte YouTube, qui rassemble près de 4 millions d’abonnés. Depuis le 24 février 2022, la journaliste russe n’a pas pu retourner en Russie. « Il est très dangereux de revenir en Russie, faire du journalisme indépendant est considéré comme étant un crime. TV Rain est actuellement classée comme une organisation indésirable par les autorités russes. », explique-t-elle. Loin de ses proches et de ses repères, elle risque de ne pas pouvoir y remettre les pieds avant de nombreuses années. 

Sandra Lochon