L’Euthanasie fait polémique. A l’occasion d’un débat organisé dans les locaux du Républicain Lorrain entre Maxims Pelletier, délégué mosellan de l’association « Droit de mourir dans la dignité » (ADMD), et le docteur Villard des soins palliatifs du CHR de Metz, les arguments ont fusés. Chaque camp veut que la fin de vie se passe au mieux. Entre points de tension et concordance.
[toggle title= »Le contexte »] Le cas de Vincent Lambert  remet violemment en lumière une controverse qui n’a jamais vraiment été apaisée depuis 2005, date d’entrée en vigueur de la loi Léonetti.  L’homme n’avait pas rédigé ses directives anticipées.  Les médecins s’occupant de lui  ont indiqué à plusieurs reprise que l’acharnement thérapeutique en cours était « au-delà du raisonnable ». Mais un conflit familial empêche pour l’heure la décision de stopper tout traitement, la mère de Vincent Lambert la refusant. Que faire dans un cas comme celui-ci puisque, techniquement, la loi Léonetti est impuissante à faire émerger une solution ? [/toggle]

Maxims Pelletier : L’euthanasie, l’ultime liberté

Militant à l’ADMD depuis plusieurs années, Maxime Pelletier affirme que l’euthanasie n’est pas synonyme de mort à tout prix. Selon lui, il s’agit de garantir aux patients qu’il n’y aura pas d’acharnement thérapeutique. « Il faut voir la vie comme un parcours. Comment va se finir l’histoire ? Il s’agit d’un choix, celui de savoir comment on va partir. »

« On ne demande jamais à mourir pour mourir »

Ce jeune professeur de ST2S (sciences et technologies de la santé et du social) rappelle que « euthanasie » signifie « bonne mort. » Une bonne mort qui relève d’un choix, celui de l’individu. « Il s’agit avant tout de laisser la liberté au patient de choisir. » Pour ce délégué mosellan, l’euthanasie doit être encadrée.
Récemment il a rédigé ses directives anticipées, une décision lourde de conséquences : « l’euthanasie n’est pas un acte anodin. La choisir n’est pas une facilité », explique-t-il calmement. Le Messin insiste également sur la liberté du médecin d’activer sa clause de conscience. « Ce n’est pas une volonté de tuer pour tuer. Le médecin ne doit pas être obligé si cela est contraire à ses principes. »

La peur de « mal mourir »

Le délégué ADMD s’insurge également contre le mythe du « médecin tout puissant. » Il leur reproche de parfois trop en faire. « Il faut que chaque médecin prenne en compte la personne qu’il a en face de lui », souligne-t-il. Certains médecins tenaces iraient au-delà des capacités et des souhaits de leurs patients. L’acharnement thérapeutique est dénoncé. Il le répète : « C’est au patient de choisir son sort. » Maxims Pelletier insiste aussi sur les dispositions existantes et pourtant méconnues du plus grand nombre comme la personne de confiance ou les directives anticipées. Concernant ces dernières, « elles ne sont prises en compte qu’à titre indicatif actuellement, mais on espère que cela changera », déplore le militant.

 Dr Villard : “La législation ouvrira la boîte de Pandore”

Voir l’euthanasie passer de l’exception à la norme angoisse le Dr Villard. « À la base, on légalise pour régler des situations extrêmes. » Au fil du temps, la marge s’élargit. Il cite en exemple la Belgique. Dans la situation actuelle, des prisonniers, des personnes âgées démentes et des dépressifs peuvent réclamer une euthanasie. Ce médecin est catégorique, « si une législation est mise en place, je refuserais d’appliquer la loi, je ferais jouer ma clause de conscience. »

La souffrance est au cœur du problème

« La demande d’euthanasie émane d’une souffrance, physique ou spirituelle » affirme le Dr Villard. Les soins palliatifs atténuent ces douleurs. Cette démarche doit prévaloir sur l’euthanasie. Au cours de sa carrière, ce médecin confesse avoir entendu une dizaine de demandes d’euthanasie. “Dans la majorité des cas, une fois que la souffrance est entendue, la demande est annulée.”
Selon ce professionnel, la famille souffre énormément de voir un proche au crépuscule de sa vie. « Pour eux, une journée est une épreuve interminable, mais pour le patient c’est une victoire supplémentaire. » La peine de la famille influence les décisions du patient. Il se perçoit comme un poids que l’on doit supprimer. Pourtant, l’envie de vivre des patients est réelle, selon ce médecin. Si des malades refusent d’être admis en soins palliatifs, c’est parce-que ces structures sont associées à la mort. C’est pour cette raison que le Dr Villard refuse que les directives anticipées deviennent un droit opposable. Ces démarches seraient trop anticipées.« L’état d’esprit d’une personne en pleine santé change dès lors qu’il devient un patient. »

Les soins palliatifs ont des limites

Ce praticien reconnaît aisément que les soins palliatifs ont leurs faiblesses. Cette discipline, enseignée seulement depuis une vingtaine d’années dans les facultés de médecine, est encore peu connue du grand public. Et même si en théorie tous les patients peuvent bénéficier de ces soins, des problèmes physiologiques ou logistiques peuvent empêcher leur admission.
Pour les endiguer, le médecin veut accentuer la diffusion des principes de la culture palliative. Cette philosophie consiste entre autre à préparer et à accompagner le patient à recevoir ces soins. Mais également à ne pas pratiquer d’acharnement thérapeutique. Sur ce dernier point, le Dr Villard admet son impuissance face aux comportements de certains de ses collègues « dans chaque métier, il y a des obtus. »

Retrouvez les interviews de Maxims Pelletier et du Dr Villard, sur la chaîne du Républicain Lorrain.

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