Propos injurieux, partage de contenus racistes, hashtags homophobes ou antisémites. Aujourd’hui, la Toile libère la parole autant qu’elle donne libre cours aux propos offensants. Des messages vite publiés, qui peuvent avoir de lourdes conséquences. Alors, que dit la loi ? Qui risque quoi ? Comment est classifié ce que l’on publie sur les réseaux sociaux ?

Votre compte Facebook est accessible à tous, vous publiez des billets sur un site, vous partagez du contenu offensant, vous twittez… Publier en ligne, c’est rapide, c’est indolore, mais ça laisse des traces. Vous n’imaginez pas tout ce qu’on risque avec un tweet déplacé. Webullition fait le tri dans les textes de loi, pour savoir ce qui est punissable ou pas, en ligne.

Ce que dit la loi

Penchons-nous sur les injures. Selon la loi, une injure « est punie différemment selon qu’elle ait été prononcée en public ou en privé ». Elle est qualifiée de publique « quand elle peut être entendue ou lue par un public inconnu et imprévisible. » C’est le cas d’une injure prononcée dans la rue, dans un journal, et sur internet.  En clair, on ne peut pas crier n’importe quoi dans la rue, dans son jardin, ou chez soi, que ce soit à un ami, à sa famille ou à un groupe de personnes que rien ne rassemble.

L’injure devient non-publique lorsque prononcée devant « un cercle restreint de personnes formant une communauté d’intérêt ». Exemple: entre deux amis, dans un comité d’entreprise, car ces personnes ont une appartenance commune (amis, club sportif, entreprise, famille, etc).

Les propos en ligne

En ligne, les propos tenus sont qualifiés de publics s’ils sont accessibles à tous. C’est le cas d’un site internet. L’éditeur (ou auteur) des propos est jugé responsable. L’hébergeur lui assure un relais technique pour l’auteur : il stocke son contenu. Cela ne signifie pas qu’il est au courant de ce qui est publié grâce à son service. Sa responsabilité est engagée que s’il est prouvé qu’il était au courant et qu’il n’a rien fait pour modifier ou supprimer ces contenus délictueux.

En revanche, un mail entre deux personnes qui se connaissent a un caractère non-public (le cadre est confidentiel puisque limité à ces deux personnes). Evidemment, ce schéma a ses limites : un mail adressé à plusieurs dizaines de personnes n’est pas privé si ces individus ne forment pas un groupe d’intérêt.

Le cas des réseaux sociaux

Public : une injure publiée via un profil de réseau social non-verrouillé est publique : tout le monde y a accès. C’est le cas d’un compte facebook ouvert (ainsi que des pages fans, pages d’entreprises…), mais aussi d’un compte twitter (toujours ouvert à tous).

Non-public : un profil Facebook accessible uniquement à un nombre « restreint » d’amis ? Non-public. Idem avec un compte Twitter verrouillé ? Non-public. Cependant, la loi ne précise pas combien de destinataires équivalent à un « nombre restreint », et donc à partir de quand les propos deviennent publics. Le mieux est donc encore de ne rien publier d’offensant sur ses profils numériques. Enfin, imaginons le cas d’un groupe Facebook ouvert, rassemblant plusieurs milliers de membres. Ici, c’est le caractère « communauté d’intérêt » qui prévaut, pas le nombre.

Qui est responsable ?

Imaginons que vous publiez du contenu injurieux. Malin comme vous êtes, vous vous dites que ce n’est pas de votre faute, que c’est l’hébergeur (ou le réseau social) qui est en tort, puisque c’est lui qui abrite les messages frauduleux. Manque de chance, c’est bien l’auteur du contenu qui est en tort. L’hébergeur « n‘est qu’un intermédiaire technique et il ne choisit pas de mettre en ligne tel ou tel contenu. Il n’a pas la connaissance, ni le contrôle des contenus stockés ». Les réseaux sociaux sont également considérés comme tels. Conclusion : si vous constatez sur un site ou un réseau social un contenu que vous jugez illégal, vous pouvez, dans l’ordre, le signaler à l’auteur, puis à l’hébergeur si vous restez sans réponse, sur le portail Pharos. Enfin, si vous êtes personnellement attaqué via des propos injurieux, diffamants ou menaçants, intenter une action en justice (avec toute la mesure que cela implique).

Cela dit, l’hébergeur peut être jugé responsable dans trois cas :

  • s’il a eu connaissance de l’existence des contenus
  • si « ces contenus présentent un caractère manifestement illicite, c’est-à-dire constituant une violation évidente d’une règle de droit« 
  • s’il ne retire pas au plus vite les contenus après leur signalement

Pour le cas d’un commentaire faisant suite à la publication d’un contenu, la responsabilité revient à son auteur. L’éditeur du contenu n’est pas tenu responsable des réactions qu’il génère s’il n’en a pas connaissance, ainsi que s’il les supprime « promptement« .

Les risques

Concrètement, tout contenu; public ou non, jugé illégal renvoie à une contravention. D’ailleurs, l’injure publique peut vous coûter jusqu’à 12 000 €. Si elle s’avère raciste, sexiste, homophobe ou contre les handicapés, le total grimpe à 22 500 €, accompagnés de six mois de prison maximum.

Côté non-public, la contravention pour une injure est de 38 €. Si elle est raciste, sexiste, homophobe ou contre les handicapés, c’est 750 €.

Et pour ceux qui souhaitent faire retirer par la justice un contenu dont ils connaissent le caractère licite, il en coûte 15 000 €.

Ce qu’on ne devrait pas trouver en ligne

En plus de commentaires Facebook haineux, Twitter est régulièrement en proie à des « tendances » douteuses. On se souvient du hashtag #Unbonjuif, ou encore de #SimonfilsestGay. Ajoutons #Lesgaysdoiventdisparaître, #BrulonsLesGaysSurDu, #SiMaFilleRamèneUnNoir et le remarquable #SiJetaisNazi (on ne les oublie pas : #antinoir, #L’HommeNoirEstInférieurCar, #NiqueLesArabes et tant d’autres). Dans la même idée, on se souvient de la page Facebook d’Anne-Sophie Leclère et de sa comparaison de Christiane Taubira avec un singe. Résultat ? Neuf mois d’emprisonnement ferme (sans compter l’amende de 50 000 €). Le 20 janvier, trois utilisateurs de Twitter ont été condamnés après publication de messages homophobes.

NDLR: toutes les citations en italique sont issues du site du service-public, que vous pouvez consulter pour plus de précisions.