La paranoïa agit comme un étau. Obnubilé par la survie, on en oublie de vivre

Ouf. Soulagement. Le FN n’a remporté aucune région aux dernières élections. Victoire du front républicain ? La question se pose. L’extrême droite, cet affreux épouvantail agité comme ennemi de la République par les classes politiques dirigeantes, a été largement battue au second tour de ces régionales. Mais ce n’est pas vraiment cette victoire que l’on retiendra. Non, ce que l’on retiendra ce sont les scores historiques du parti de Marine Le Pen. Les listes frontistes ont récolté 6 820 301 voix au second tour. Un record qui dépasse largement celui établi en 2012 lors de la présidentielle.

[toggle title= »Les résultats du FN au second tour des élections régionales »]

Source : ministère de l’Intérieur
[/toggle]

A qui la faute ? Nous pourrions citer les abstentionnistes ou encore l’inefficacité des derniers gouvernements à proposer des solutions viables face la crise et à la précarité. Mais pas besoin de nous épancher dessus, la quasi totalité de la presse s’en est déjà chargée.

Ce qu’il faut noter, c’est l’impact des attentats et de la peur provoquée par les événements tragiques du 13 novembre à Paris. L’ennemi Daesh est apparu plus puissant que jamais aux yeux d’un grand nombre d’électeurs. Ces derniers, persuadés que la menace se trouvait à chaque coin de rue, ont trouvé dans le discours des candidats du FN un écho à leur crainte. Ces hommes et ces femmes politiques leur ont promis un monde sans menace car la société qu’ils prônent est une société, entre autres, sans réfugiés. « Fermons les portes de la France ». Ah oui ! Quel beau discours. Laissons des milliers d’êtres humains périr aux frontières de notre continent. Fermons nos portes quand bien même il y aurait du sang sur la poignée !

C’est guidés par la peur, guidés par la paranoïa, qu’ils se sont précipités pour aller voter en faveur de Marine, Marion-Maréchal et leurs acolytes du FN. Le vote d’une bonne part de la population n’a pas été motivé par un raisonnement réfléchi et posé mais par un sentiment de crainte. Plusieurs Français n’ont pas voté avec leur tête mais avec leur peur.

Le jeu du FN

Sauf que la peur provoque l’amnésie. Vicieuse et corrosive, elle s’immisce dans les zones les plus reculées de notre cerveau. Nous faisant oublier que la sécurité ne fait pas partie des compétences du conseil régional. Nous faisant oublier aussi que les valeurs de la France résident avant tout dans ses libertés et non pas dans des mesures de sécurité restrictives. Elles résident dans sa tolérance et sa fraternité. Or la paranoïa agit comme un étau. Obnubilé par la survie, on en oublie de vivre. On pointe du doigt un groupe de la société et on l’accuse de tous les malheurs. On en vient même à douter des bi-nationaux (surtout les ministres Najat Vallaud-Belkacem et Myriam El Khomri), les prenant pour des traîtres à leur nation alors qu’ils en sont les meilleurs ambassadeurs.

On accuse, on stigmatise, on divise. Autrement dit, on joue le jeu du Front National. Et celui des terroristes également. Car le rejet des différences au nom d’un principe sacro-saint d’identité nationale ne fait que renforcer l’exclusion. Un terreau particulièrement privilégié par les recruteurs des cellules djihadistes. Le FN n’est pas la solution à la sécurité. Prenons exemple sur la Norvège qui, après le massacre perpétré par le forcené Anders Behring Breivik en 2011, avait décidé de répondre à la barbarie par plus de liberté et plus de démocratie.

Lors des prochaines élections, il serait de bon ton de ne pas voter en aspirant à vivre plus longtemps seul mais plutôt à mieux vivre ensemble. Mettons le pouvoir de la démocratie au service des libertés, pas des restrictions.