A 27 ans, Yoann Verdier, community manager pour eLive entertainment est plus connu sous le pseudonyme de Ken Bogard. Mais rien à voir avec Humphrey puisqu’il est en fait l’un des commentateurs emblématiques de ce qu’on appelle aujourd’hui la scène Street Fighter française.Ken_BogardCrédit photo: Carmelo Giordano

 

Série emblématique des jeux de combat, Street Fighter permet à deux joueurs de s’affronter virtuellement grâce à de nombreux personnages. Depuis 1991 et la sortie de Street Fighter 2 sur Super Nintendo, l’engouement est tel que certains joueurs vont jusqu’à s’entraîner des journées entières pour être le meilleur. Ces « e-sportifs » participent à des compétitions qui réunissent un public toujours plus nombreux et proposent des prix toujours plus attractifs, les récompenses pouvant atteindre plusieurs milliers de dollars.

 

Micro au poing et casque sur les oreilles, avec un pseudonyme issu tout droit de Street Figther, Ken Bogard fait partie de la nouvelle génération de commentateurs vidéoludiques qui publient sur internet les plus grands matchs commentés par leurs soins. A l’instar d’un Jacques Monclar pour le basket, il est de ceux qui vivent et font vivre les jeux pour le plus grand plaisir des spectateurs.

Comment en êtes-vous venu à commenter des matchs de Street Fighter ?

Le facteur déclencheur ça a été le Stunfest en 2008 à Rennes. C’est un des plus gros rassemblements de jeux de combat d’Europe. Beaucoup de joueurs s’y réunissent et s’affrontent dans des tournois pendant plusieurs jours.

J’y suis venu en simple spectateur et pour la première fois j’ai vu un tournoi commenté sur scène. C’était avec des gens comme Zouzou ou Asenka (Ndlr d’autres commentateurs), voir ça en vrai ça a un tel panache! J’ai kiffé à mort et je me suis demandé pourquoi est-ce qu’il n’y a pas plus de gens à faire ça alors qu’internet est à disposition.

Ça rend les matchs beaucoup plus intéressants et on comprend mieux ce qui se passe à l’écran. Je pensais m’y mettre à l’occasion mais elle ne s’est présentée qu’au bout de quelques mois, fin 2008. Street Fighter IV est sorti sur borne d’arcade et était annoncé pour mars 2009 sur console. C’était le moment ou jamais et je m’y suis mis.

Vous pensez que l’e-sport a un avenir en France ?

D’abord, le terme d’e-sport me gêne un peu, comme la majorité des membres de la communauté des jeux de combat. C’est raccrocher la compétition de jeux vidéo à un concept, comme si pour acquérir ses lettres de noblesse il fallait forcément être accolé au terme de sport. Il faut garder à l’esprit que le jeu de combat, c’est historiquement le jeu du peuple, à l’époque on pouvait y jouer pour 5 francs au bar du coin, c’était accessible et pas besoin d’être riche comme pour la communauté PC où il fallait du matériel et une bonne connexion internet.

Après pour qu’on connaisse le même développement qu’en Corée avec la scène Starcraft (Ndlr : un jeu de stratégie édité par Blizzard et qui est énormément pratiqué en compétitions) où Samsung a pris les choses en main, y a mis beaucoup d’argent et en a profité pour faire sa pub. On sait que ça arrivera en France, mais on ne sait pas quand, on démarche des marques mais personne ne prend le risque. Pour que ça fonctionne, il suffirait d’une goutte d’eau mais c’est une goutte qui coûte cher.

Pour pouvoir se dire commentateur, il faut avoir une certaine expertise du jeu concerné ?

L’avantage est qu’entre les Street Fighter il y a une certaine continuité. Les coups restent majoritairement les mêmes d’un jeu sur l’autre, donc il faut se concentrer sur le nouveau système de jeu et les nouveaux personnages. J’ai toujours été un gros consommateur de vidéos à l’époque où elles n’étaient pas commentées, donc j’avais déjà le vocabulaire en tête. En revanche j’ai eu beaucoup de travail à faire sur l’assurance de la voix, le débit, le ton.

Et ça se travaille comment ?

En commentant des heures et des heures de vidéos. Mais surtout en les exposants au public sur internet, pour avoir un véritable retour critique sur mon travail. C’est en postant toutes les semaines que j’ai su ce qu’il y avait à changer. Et si aujourd’hui ça va, je pense que j’ai encore du chemin à faire.

Vous avez des modèles de commentateurs sportifs ?

Oui, bien sûr, des vieux commentateurs comme Léon Zitrone, d’athlétisme ou de football à la radio. Des hommes qui avaient l’habitude de beaucoup parler et qui faisaient réellement vivre les matchs et comme on en voit aujourd’hui relativement peu à la télé. Les commentateurs de catch comme Philippe Chereau et Christophe Agius m’ont aussi beaucoup inspiré.

Vous pouvez retrouver Ken Bogard sur son site personnel ou sur sa page eLive.