Manon, 22 ans, est une jeune Forbachoise de tempérament. Malgré un parcours assez chaotique, elle semble aujourd’hui avoir trouvé sa voie : accompagnatrice socioprofessionnelle.
Portrait.

Une rebelle assagie
C’est à Petite-Rosselle, ville moyenne du nord-est de la France que Manon, 22 ans, m’accueille chez elle un dimanche de novembre. Habillée, maquillée, mais « pas coiffée », précise-t-elle, la jeune femme est en train de rédiger des lettres de motivation. « C’est rare de me trouver apprêtée comme ça un dimanche. D’habitude, c’est le jour où j’aime ne rien faire en jogging » me glisse-t-elle en souriant. Cette brune aux yeux bleus aime plaire au premier regard. « Je n’ai pas pu me lisser les cheveux, faîtes pas trop de photos ! » ajoute-t-elle en riant. Nous nous installons à table pour démarrer l’entrevue. Stressée, elle me demande même si l’article sera vraiment publié. Après l’avoir rassurée sur mes intentions, elle accepte de commencer l’entretien.
Le parcours de Manon n’est pas celui d’une petite princesse qui réussit tout ce qu’elle a entrepris dans sa vie. Pas très assidue à l’école, elle le regrette aujourd’hui : « Si je pouvais revenir en arrière, c’est un cliché, mais je travaillerais à l’école ». Petite « racaille » comme sa mère l’appelait, Manon était plutôt du genre à sécher les cours et à contrer sans cesse l’autorité des gens qui l’entouraient. Aujourd’hui, tout cela la fait sourire, mais à l’époque, c’était une véritable calamité pour ses parents.
Manon a donc un sacré tempérament. Son jeune frère de 14 ans, qui écoute discrètement notre conversation se permet un commentaire : « Elle est gentille, mais ça dépend avec qui. Faut pas l’embêter. » Me voilà prévenue.
Mais le déclic survient lorsque sa grand-mère tombe malade. La Manon rebelle se calme. « Je voulais être auprès d’elle, c’était mieux qu’une personne extérieure. »  Très proche de ses grands-parents, elle décide de faire appel à l’AFAD pour s’occuper personnellement de sa mamie. « On ne peut pas la laisser seule, elle se promène dehors la nuit, elle pourrait se blesser, je ne peux pas laisser faire ça. » Ce qui était un choix familial avant tout. Mais cela a eu pour effet de mettre la jeune femme sur la voie d’une carrière dans le social.
Après 9 mois passé dans une maison de retraite, c’est « une véritable transformation » me confie sa mère : « Avant, c’était totalement une racaille, faut dire ce qui est. Mais après la maison de retraite, pouf, elle était transformée. Et j’en suis fière. » Une transformation qui a donné des ailes à Manon. « J’ai gagné en maturité. Il fallait se responsabiliser, savoir les gérer, c’est pas facile, mais c’est cool, j’adore faire ça. »

Un métier difficile
« Je voulais aider d’autres personnes dans le besoin. Et je sais parfaitement que tout le monde n’est pas capable de faire ce que je fais. » explique gravement Manon. Son métier actuel n’est, en effet, pas facile. Deux fois par semaine, elle accompagne Jérémy, 16 ans, qui souffre du syndrome CHARGE, à son école, à Poitiers. Le jeune homme, malvoyant, malentendant, nourri par sonde, cumule également des problèmes de dos, de poumons et ne peux pas parler correctement. « Au début, je ne pensais vraiment pas y arriver » confie Manon, « Avec mon tempérament, je me disais que si quelqu’un le dévisageait ou autre, j’allais m’énerver de suite ». Mais Jérémy a besoin d’elle pour se rendre à son école. Tous les lundis et vendredis, un train les attend, à la gare de Metz, à 6h13, direction Paris. Avant l’intervention de Manon, c’était la mère de Jérémy qui faisait ces trajets. « Elle est tombé malade, à force, c’est très fatigant. » La jeune femme a donc du « remplacer » la mère du jeune handicapé. « Il ne m’aimait pas trop au début… Je suis allée chez eux plusieurs fois, pour qu’il s’habitue à ma présence. Et avec le temps, il s’y est fait, ça se fait tout seul en fait. » Aujourd’hui, les deux jeunes gens s’entendent même très bien. « Je m’amuse avec lui, il a des jouets, on regarde des films, je lui caresse le bras etc… M’occuper de lui n’est pas une contrainte pour moi. »
Manon est fière de ce qu’elle entreprend. « Je me sens utile, je sers à quelque chose ! Et je conseillerais ce métier à n’importe qui. C’est une véritable aventure humaine, faut se lancer. Ça change les personnes. »

De l’espoir
« A la base, je voulais m’occuper d’enfants. Je voulais pas voir des handicapés ou des personnes âgées, non non, je voulais voir les jolis bébés, tout mignons moi. » se souvient Manon, en riant. Mais accompagner Jérémy l’a changée.
Un pincement au cœur en voyant le jeune handicapé ? « Oui et non parce que dans ce cas, ça s’apparenterait davantage à de la pitié et il n’en a vraiment pas besoin. Mais je vois la vie différemment. Avant je me plaignais pour un oui ou pour un non… Maintenant je réfléchis, je pense à l’existence de ces personnes handicapés ont, et ils ne se plaignent pas eux. »
Quel avenir alors pour cette jeune Forbachoise ? « Je vis au jour le jour, je ne me projette pas. J’ai un rêve, c’est reprendre mes études et passer le diplôme de monitrice-accompagnatrice. Sinon, ben je me trouve un homme riche, parce que de toute manière, je suis une princesse. » s’esclaffe-t-elle.
L’appel est lancé !

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