Logée au camping municipal de Metz depuis cet été, une famille de réfugiés originaire du Congo cherche en vain le soutien de la mairie. Mais le temps presse pour Hitachi, Rachel et leurs trois enfants qui doivent trouver une solution avant la fermeture hivernale de l’établissement prévue le 30 septembre.

La tente où vivent Hitachi, Rachel et leurs trois enfants

Une tente sommaire protégée par une toile cirée. Voici le logement dans lequel la famille Manguana a trouvé refuge depuis bientôt 3 mois. Proche de la Moselle, leur “habitation”, située au camping municipal, est en permanence menacée par les inondations. Visage creusé et caché derrière une capuche, Hitachi souffre du manque de sommeil et du froid qui se fait de plus en plus ressentir.“Ils sont très fatigués”, indique Geneviève Gisquet, bénévole au Collectif Mosellan pour le Droit au Logement. L’hygiène, elle aussi, reste très rudimentaire. Les seuls sanitaires disponibles sont les toilettes et les douches du camping, à 300 mètres de la tente.

“On s’ennuie”, soupire Rachel. Sans papiers conformes, il est impossible pour les deux réfugiés de trouver du travail. Pourtant, ils parlent et écrivent français. “Je possède aussi le permis de conduire”, pointe du doigt Hitachi. La seule occupation du couple : emmener et récupérer les enfants à l’école. « Ça leur permet d’avoir au moins un repas chaud”, appuie Geneviève. Au moment des devoirs, les trois enfants doivent se contenter du sol pour poser leurs cahiers. “Ils sont courageux les enfants, ils ont toujours le sourire”, observe la bénévole. “Ils n’ont pas le choix”, renchérit Hitachi. 

“On avait une maison, on n’avait pas à dormir dans une tente”

Pourtant, les Manguana n’ont pas toujours vécu ainsi. Originaire du Congo, la famille a fui le pays pour rejoindre l’Europe en 2014. Leur premier arrêt : l’Italie. Grâce à leur statut de réfugiés politiques, l’Etat italien leur offre une protection subsidiaire. Tout semble s’arranger pour eux : les enfants allaient à l’école et Hitachi et Rachel avaient tous les deux trouver un emploi. La naissance de leur troisième enfant est une consécration.  “En Italie, on était bien. On avait une maison, on n’avait pas à dormir dans une tente”, regrette Hitachi. 

Alors que la famille commence cette nouvelle vie, un incident survient. “On a été victime d’un acte de vandalisme”, se rappelle le réfugié. Un jour, Hitachi se rend compte que sa voiture a été piégée. Les deux parents pensent à des intimidations racistes. Retour à la case départ pour la famille qui se tourne alors vers la France. “On est venus ici parce qu’il y avait trop de souffrances là-bas”, se lamente Hitachi. En 2019, ils trouvent refuge à Lille où un foyer leur ouvre ses portes. Au bout de trois ans, les Manguana doivent quitter ce lieu.

C’est à ce moment que la famille atteint la capitale de la Moselle. “Mais le 115 n’a pas pu les loger”, déplore Geneviève. Recueillis sous l’aile protectrice du Collectif Mosellan pour le Droit au Logement, les réfugiés sont installés au camping municipal. Mais le calvaire continue pour ces réfugiés qui doivent abandonner la tente le 30 septembre, lors de la fermeture du camping municipal. À ce jour, ni la famille ni le collectif n’ont trouvé de solution d’hébergement.

La sourde oreille de la municipalité 

Si la famille est soutenue par l’association, plusieurs syndicats, ainsi que des commerçants sous forme de dons, la municipalité reste inactive face aux appels à l’aide. « Même des animaux on ne les laisserait pas comme ça », s’indigne Geneviève. D’après le collectif, l’agglomération de Metz compterait pourtant 11 000 logements disponibles pour accueillir les parents et leurs trois enfants. Le dialogue entre la famille et la commune s’ouvre progressivement. Rachel et Hitachi ont notamment pu s’entretenir avec trois conseillers municipaux, venus sur place constater les conditions de vie du couple. Mais les échanges restent timides et rien n’est fait pour leur venir en aide. « La mairie ne nous aide pas, on est seuls dans cette situation », souffle Hitachi, dont l’avenir reste incertain. 

Après une première rencontre avec Guillaume Godey, directeur de cabinet du maire de Metz François Grosdidier, les échanges restent au point mort, la mairie rejetant la responsabilité sur la préfecture de Moselle. « Ils ne font que de se renvoyer la balle depuis des semaines », souligne Geneviève. Au centre du problème : une Obligation de Quitter le Territoire Français (OQTF) aurait été ordonnée à l’encontre de la famille Manguana. Mais le père de famille ainsi que son avocat affirment ne rien avoir reçu à ce jour. Le sort des réfugiés reste donc suspendu. « Ce n’est pas parce qu’ils ont possiblement une OQTF qu’on devrait les laisser comme ça », déplore Geneviève. 

Sollicitée pour une interview, la mairie n’a pas donné suite à nos demandes.

Theo LILIN et Marie RABIN