François Ruffin a présenté en avant-première son nouveau film Debout les femmes mercredi 6 octobre à Metz. Il expose les conditions de travail difficiles des femmes des “métiers du lien”, qui jonglent entre journées surchargées, rémunération insuffisante et manque de reconnaissance.

“Debout les femmes” scandent des dizaines de voix anonymes à l’unisson tandis que les lumières se rallument à la fin du documentaire. Les spectateurs sont debout et congratulent les réalisateurs François Ruffin et Gilles Perret qui traversent la salle sous les applaudissements. Pendant une heure et demie ils ont alterné entre les rires et les larmes en découvrant la réalité du travail dans les métiers du lien pour certains, et en voyant leur quotidien mis en images pour d’autres. 

Auxiliaires de vie, aides à domicile, femmes de ménage… plus d’un million de personnes en France, principalement des femmes, exercent ce que le député de La France Insoumise appelle les “métiers du lien”, dans des conditions de travail et de vie souvent précaires. Entre 2019 et 2020 il a suivi une dizaine femmes, accompagné du député La République en Marche (LREM) Bruno Bonnell dans le cadre d’une mission parlementaire. Elle a conduit à une proposition de loi pour la reconnaissance des métiers du lien présentée à l’Assemblée le 29 septembre 2020. Sorti en salles le 13 octobre, Debout les femmes raconte cette mission sociale sous la forme d’un road movie en nous amenant à leurs côtés de Amiens à Paris en passant par Dieppe ou Abbeville.

Le dernier lien social

Avec Debout les femmes, c’est la triste réalité de ces professions que le spectateur découvre. Le film suit une accompagnante d’élèves en situation de handicap (AESH) qui aime son métier mais est obligée d’en chercher un autre pour vivre convenablement. Le réalisateur filme également une aide à domicile en pleurs, qui raconte sa relation amicale avec un de ses patients dont elle s’est occupée pendant 10 ans jusqu’à son décès. Une autre se prive de tout plaisir extérieur et de vie de famille pour prendre soin de ses usagers 12 heures par jour pour un salaire de 750 € par mois.

Très présente dans le film, la faible rémunération des aides à domicile pousse certaines d’entre elles à chercher un autre travail. D’autres font le choix de continuer à exercer leur profession malgré les difficultés, pour ne pas abandonner leurs patients.

Ménage, toilette, préparation des repas et parfois dernier lien social pour leurs usagers, les fonctions des aides à domicile sont nombreuses. “Nous jouons un rôle essentiel dans la collectivité, si nous n’étions pas là, toutes les personnes dont nous nous occupons devraient être dans des maisons de retraite ou des instituts spécialisés pour personnes handicapées.” commente, dépitée, Élisabeth, une aide à domicile venue assister à l’avant-première. “La plupart de mes collègues sont en dessous du seuil de pauvreté, comment peut-on continuer notre métier avec si peu ?” interroge-t-elle.

Aurélie, Frédéric et Élisabeth sont aides à domicile, ils se sont reconnus dans les combats de Debout les femmes.

Aider, mais à quel prix ?

“Je vois mes films comme des outils” déclare François Ruffin durant la séance de questions-réponses à la fin de la projection. “Un outil, si on le laisse sur l’établi, il ne sert à rien mais si on l’utilise on peut faire de grandes choses”.

Venu assister à la séance avec Élisabeth, Frédéric est aide à domicile à ALYS, la 2ème plus grande association d’aide à la personne de la région Grand-Est. Il compte bien se servir de Debout les femmes pour faire entendre sa principale revendication : une revalorisation des salaires.

Les spectatrices partagent le même constat que les protagonistes du documentaire : peu d’estime est accordée à leur profession. “On subit un manque de reconnaissance de la part de l’État qui a découvert que notre métier existait avec le Covid, car pendant le premier confinement les personnels de santé dont font partie les aides à domicile étaient les seuls à travailler” déplore Aurélie, une autre de ces femmes du lien venue découvrir le film. “On fait aussi parfois face à un manque de reconnaissance de la part de nos usagers qui nous voient seulement comme des femmes de ménage alors que notre rôle principal est de permettre à ces personnes de continuer à vivre à leur domicile”, ajoute sa collègue Élisabeth. 

Fin août 2020, les aides à domicile ont appris qu’elles feraient partie des bénéficiaires de la prime Covid pour les personnels de santé, d’un montant de 1 500 € en Moselle. “Une maigre consolation pour celles qui ont enchaîné des semaines de 60 h” commente Aurélie, s’estimant en droit d’attendre plus de soutien de la part de l’État. En quête de reconnaissance, les femmes des métiers du lien cherchent de l’aide pour continuer à aider les autres à vivre. Il faudra plus d’un film pour gagner ce combat.