Benoît Hamon à Nancy - Revenu universel d'existence

Le revenu universel s’est durablement installé dans le débat de l’élection présidentielle de 2017. Mais il existe autant de version de ce concept économique que de candidats. Analyse du revenu universel de solidarité version Benoit Hamon, qui en a fait la figure de proue de sa campagne.

« Irréaliste », « utopique »… La place prise par une proposition politique se mesure au degré d’attaques qu’elle subit. Si l’on en croit ce théorème, le revenu universel proposé par Benoît Hamon s’est bien imposé au centre des débats de la primaire de la belle alliance populaire, dont le premier tour se déroulera le 22 janvier. Ses principaux adversaires n’ont pas de mots assez durs pour décrédibiliser sa proposition. Le 10 janvier sur France Info, Manuel Valls n’a pas hésité à dégainer le terme « assistanat ». Dans le numéro de Libération du 9 janvier, Arnaud Montebourg le qualifie, pour sa part, de « cataplasme social » estimant qu’il y aujourd’hui assez de travail, mais qu’il est simplement mal payé.

Benoît Hamon juge, à l’inverse, qu’il faut faire le deuil du plein emploi et de la croissance. Une déclaration qu’il n’a pas eu peur de réitérer lors de son meeting à Nancy le 6 janvier dernier devant les anciens syndicalistes de Florange. L’actuel troisième homme de la course à l’investiture socialiste propose de repenser le système social français et le rapport au travail à l’aune d’une raréfaction de ce dernier qu’il considère inéluctable. Son argument :  une enquête de l’OCDE – « qui aux dernières nouvelles n’est pas un repère d’économiste marxisants » s’excuse-t-il presque – selon laquelle l’automatisation du travail déclencherait la destruction de 11% des emplois (en réalité une autre note publiée par l’OCDE en juin 2016 calcule que seulement 9% des emplois seraient menacés par la robotisation).

Benoît Hamon croit au revenu universel d'existence
Benoit Hamon à Nancy le 6 janvier 2017 – ©Lucas HUEBER

En outre, en remplaçant des humains par des robots, les entreprises feraient des économies sur les impôts. Il schématise en avançant « qu’un portique ne cotise pas. » D’où sa proposition d’instaurer une « taxe robot » qui imposerait chaque machine utilisé dans une entreprise comme le serait n’importe quel employé.

Un revenu garanti pour tous… même Carlos Ghosn

C’est dans le cadre de cette réflexion sur les mutations de la société du travail que Benoît Hamon propose l’instauration d’un revenu universel dit d’existence. Un revenu de 500 à 1 000 € par mois versé à tous les français à partir de 18 ans et sans distinctions de revenus.

Pour y parvenir, trois étapes : revalorisation, élargissement et généralisation. Premièrement, la revalorisation du RSA et sa distribution automatique aux 18-25 ans. Deuxièmement, l’élargissement de la distribution des minimas sociaux pour les emplois les moins bien payés. Enfin, la généralisation complète à toutes les couches de la société. Pour quel horizon ? Benoit Hamon refuse de fixer une date.

Forcément, la proposition bouscule, d’autant que le projet coûterait près de 300 milliards d’euros, presque l’équivalent du budget annuel de la France. Pas un problème pour le candidat, qui fait la comparaison avec la construction de la sécurité sociale par le Conseil National de la Résistance « qui pesait alors la totalité du PIB français » selon lui. Sans oublier hier lors du premier débat de la primaire de renvoyer Manuel Valls à l’instauration du RMI par Michel Rocard en 1988.

Difficile aussi de faire accepter à gauche l’idée que même les plus riches puissent profiter d’un revenu universel au même titre que n’importe qui. Là aussi aucun problème pour l’ancien ministre qui rétorque que « Carlos Ghosn (PDG de Renault) est bien remboursé par la sécurité sociale lorsqu’il a la grippe » ajoutant que l’argent sera de toute façon récupéré puis redistribué via l’impôt que les grandes fortunes sont censées payer. Judicieux d’avoir choisi cet exemple plutôt que, au hasard, Bernard Arnault, car certains PDG souffrent malgré tout de quelques réticences au moment de payer leur part. Benoit Hamon espère justement récupérer 80 milliards d’euros en luttant contre l’évasion et l’optimisation fiscale en créant une taxe patrimoine.