Christian Poveda, comme tant d’autres journalistes, hélas, a payé de sa vie son désir de faire connaître au grand public les sombres réalités de la vie des hommes. C’est au Salvador qu’il a été lâchement assassiné d’une balle dans la tête par ceux qu’il dérangeait, alors qu’il avait réalisé des reportages photographiques et un documentaire (« La Vida Loca ») sur la guerre des gangs qui sévit dans le pays où il avait choisi de vivre depuis 2004.

Le 30 mars 2010, les étudiants de la licence lui ont rendu hommage, en organisant un débat et une projection de son film La vida Loca (si injustement peu diffusé en salles lors de sa sortie en septembre 2009), à l’université Paul Verlaine, en présence de ses confrères et amis, Claude Ardid et Denis Robert.

Passionné par les Maras, ces gangs criminels salvadoriens tatoués de la tête aux pieds, il s’employait à comprendre comment des gamins de 12 ou 13 pouvaient en venir à tomber dans la criminalité et s’en remettre corps et âme à leur gang d’appartenance. « Ces enfants ont des problèmes familiaux terribles ou viennent de familles pauvres qui n’ont pas le temps de prendre soin de leurs enfants », disait-il lors d’une interview dans un journal local : El Faro.  Le Salvador, connu pour avoir un des taux de criminalité les plus élevés d’Amérique centrale, compte plus de 16 000 membres pris dans l’enfer des gangs. Pour réaliser son enquête au long cours, il s’était immergé dans ces gangs, avait réussi à y faire accepter sa présence, les membres de ces cercles fermés se laissant photographier, montrant ainsi leurs spectaculaires tatouages, dont Le Monde 2 avait publié les photos. Il s’était rendu pour la première fois au Salvador dans les années 1980 pour y couvrir la guerre civile, car il a débuté sa carrière comme photographe de guerre. Il a ainsi couvert notamment les guerres en Iran, en Irak, au Liban. Des titres internationaux aussi prestigieux que Paris Match, El Pais, Le Monde, Géo, Newsweek, le New York Times ou encore Stern, ont publié ses photos reportages.

Il s’est tourné vers le documentaire dans les années 1990, en obtenant une reconnaissance professionnelle certaine pour son reportage en immersion sur le Front national dans le sud de la France.  C’était en 1998, avec « Voyage au bout de la droite ». Ses reportages ont été diffusés par les grandes chaines françaises : TF1, Canal +, Arte, Planète, ainsi que par plusieurs télévisions dans le monde : CBS News, BBC 2, TV2 Danemark – TV4 Suède – YLE Finlande – NPS Hollande – SBS Australie…

Ses reportages photos ou ses documentaires ont été présentés dans de nombreux festivals, sélectionnés pour participer à des prix dont Visa pour l’image. « Tout le monde lui disait que c’était dangereux. Lui, il disait être sûr qu’il ne courait aucun risque. Il était heureux que son film sorte fin septembre, c’était enfin une reconnaissance de son travail après de nombreuses années », a déclaré à l’AFP, Jean-François Leroy, fondateur de ce festival de photojournalisme.

« C’était quelqu’un d’adorable, d’entier, de militant. Par ses photos et ses films, il voulait dénoncer les injustices », déclare Paul Khayat un de ses anciens confrères et amis de l’agence photo Sun Set. Il était âgé de 54 ans.

Dans la pure tradition d’un Albert Londres, portant la plume dans la plaie, Christian Poveda a voulu témoigner des affres de la planète, de la misère et de la violence des hommes, pour alerter les consciences.  Les étudiants de la licence professionnelle en webjournalisme de Metz, ont choisi de lui rendre hommage en choisissant son nom pour leur promotion, car, comme le rappelle Hervé Chabalier, Pdg de l’agence Capa : « Christian Poveda est mort pour l’info, pour servir notre métier pour servir les citoyens qui ont besoin de journaux et d’image ».

Par Arnaud Mercier
Directeur de la licence professionnelle webjournalisme

 
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