En 2021, Servane Diaferia-Acevedo Reyes, mère de quatre enfants, décide de fonder le collectif « La Grenade ». Œuvrant en faveur du féminisme, le collectif reprend les valeurs de la fondatrice : intégrité, honnêteté et empathie.

C’est une femme pleine de joie de vivre que nous avons au bout du fil. Une mère de famille dotée d’une grande intégrité qui nous livre une histoire cauchemardesque vécue durant des années. Un récit qui lui a donné l’envie de créer le collectif La Grenade, venant en aide aux femmes victimes de violences conjugales.

Partir pour survivre

C’est un tout nouveau départ que s’était donné cette mère de 47 ans en venant poser ses valises à Metz. Originaire de Dijon, Servane quitte le domicile parental à 16 ans et devient vite indépendante. A 18 ans, elle décide de partir à Saint-Tropez, trouve un travail, se marie et reste dans la ville varoise pendant 13 ans.

À Saint-Tropez, Servane et son mari mènent une vie parfaite. Maman d’une fille de 7 ans et enceinte de son deuxième enfant, elle subit le comportement de son mari de plus en plus compliqué. « Il a commencé à être jaloux de nos propres enfants. Il était jaloux de la relation fusionnelle que je pouvais avoir avec eux. Un jour, j’étais en train d’allaiter mon bébé, il est arrivé, me l’a prise des bras et l’a mis brusquement dans son berceau. Ce geste n’était pas anodin, il l’a fait avec une violence que je ne connaissais pas encore chez lui. »

La vie de Servane commence à prendre un autre tournant. « Ça commençait à devenir un cauchemar. Les accès de colère devenaient de plus en plus fréquents. Il m’insultait, se moquait de moi, me rabaissait ; il commençait à me faire très peur. » déplore-t-elle.

« Vous savez, les mots sont parfois plus durs que les gestes. C’était majoritairement une violence psychologique qu’il exerçait sur moi. Une forme d’emprise accompagnée d’une jalousie possessive. Je ne pouvais plus sortir avec des amis, ou parler à des personnes sans qu’il s’énerve violemment. Il a clôturé mon compte bancaire, me disant que je n’en avais pas besoin. Puis un jour, il était en colère contre moi, il m’a bousculé, m’a attrapé par le bras et m’a poussé vers le mur. Ma fille était là. J’ai vu la peur dans ses yeux, et c’est là que j’ai pris la décision de partir. » relate Servane.

« Il me disait avoir changé »

Servane part s’installer à Metz avec ses deux enfants, laissant son mari dans le sud de la France. La procédure de divorce entamée, son ex-mari commence à changer de comportement.

« Il me disait qu’il allait se tuer, il pleurait tout le temps. Il me disait qu’il ne pouvait pas vivre sans moi. Il devenait gentil avec les enfants, et leur disait qu’ils lui manquaient. J’y ai cru, et je suis retournée avec lui. » raconte Servane. Mais la vie reprend son cours, et la jeune maman se rend vite compte que son mari n’avait pas du tout changé de comportement. « C’est devenu de pire en pire. Je suis tombée enceinte de mon troisième enfant. Un jour il m’a poussé par terre, m’a donné des coups de pied dans le dos qui ont provoqué un décollement placentaire. J’ai failli perdre mon fils et mes enfants étaient terrorisés. Il a menacé plusieurs fois de me tuer, de m’enlever mes enfants. »

Après de nombreux épisodes de violences, Servane dépose une main courante et coupe les ponts avec son ex-mari.

« Vous savez, j’ai réussi à partir, et à me sauver de cette relation. Mais j’ai toujours peur. J’ai peur lorsque j’entends la sonnerie de mon téléphone, je crains même de me rendre à ma boîte aux lettres. J’ai constamment cette peur de le recroiser. Aujourd’hui j’essaye de vivre le plus normalement possible, j’essaye de remonter la pente et je m’assure du bonheur de mes enfants.« 

Prends garde à… La Grenade

Le 8 mars 2021, journée internationale des droits des femmes, Servane présente officiellement son collectif : « La Grenade ».

« J’ai toujours été féministe dans l’âme. Mon passé a joué sur cette volonté de créer un collectif pour venir en aide aux femmes. J’ai cette chance d’être vivante, d’avoir réussi à sortir de l’emprise dont je souffrais. Je voulais œuvrer, je voulais faire quelque chose pour aider les autres. Alors j’ai décidé de fonder mon truc à moi, qui correspondait à mes valeurs. Quelque chose de vraiment féministe. » explique Servane.

Le collectif se revendique comme « collectif féministe Intersectionnel Inclusif Décolonial en non-mixité choisie ». Leur but est de lutter contre le sexisme, contre toutes les violences et injustices faites à toutes les femmes, aux enfants, à toutes les personnes LGBTQIA+ et aux minorités. Pour le nom du collectif, Servane avoue avoir eu « du mal à le trouver ». « Je cherchais un nom depuis pas mal de temps, et rien ne me plaisait. Puis j’ai pensé à La Grenade. C’est un petit clin d’œil à la chanson de Clara Luciani, mais pas seulement. Ce nom fait également référence au fruit, pour son côté à la fois acidulé mais aussi doux et plein de vitamines. Et évidemment La Grenade comme arme. Une arme pouvant être défensive, pour montrer que toute personne peut exploser à n’importe quel moment. Nous avons d’ailleurs notre slogan : Prends garde à… La Grenade collectif ! »

C’est accompagnée de nombreuses manifestantes et membres du collectif que Servane défile de temps en temps dans les rues de Metz, revendiquant les valeurs féministes qu’elle ne cesse d’enseigner à son entourage ainsi qu’à ses enfants.