Durant l’année 2023, une association de journalistes s’est créée afin de lutter contre les atteintes à la liberté de la presse. A l’occasion des assises du journalisme à Tours, l’Observatoire français des atteintes à la liberté de la presse (Ofalp) a tiré la sonnette d’alarme.
Cela fait plus d’un an que ce projet d’observatoire français des atteintes à la liberté de la presse est en discussion. Cécile Dolman, journaliste indépendante et co-président de l’Ofalp, raconte que “c’est aux Assises du journalisme de l’année dernière” que l’idée a germé dans l’esprit de plusieurs journalistes. “On avait la sensation qu’il manquait d’un organisme français qui présente plein de ressources pour centraliser toutes les informations qui existent et informer les citoyens de ce qui se passe dans le monde journalistique”, explique la journaliste.
Les procédures-bâillons comme exemple d’atteinte au journalisme
Ce n’est pas anodin si les membres de l’association ont discuté des procédures-bâillons avec d’autres journalistes pendant les Assises du journalisme de Tours. Emmanuel Poupard, journaliste au Courrier de l’Ouest et Ouest France et secrétaire général du syndicat national des journalistes (SNJ), indique que “c’est une procédure qui vise à bâillonner un journaliste”. Et qui prennent parfois des chemins de traverse. “Il y a un contournement des droits de la presse par le biais du tribunal de commerce, alors qu’ils ne sont pas formés pour ça”, explique la co-présidente de l’Ofalp. Cécile Dolman insiste également sur le fait que ce phénomène s’est accentué en France, “jusqu’en 2022. Cette année-là, la France est passée devant Maltes et la Pologne en terme de nombre de procédures-bâillons. Notre pays est devenu le premier européen concernant les procédures-bâillons. »
Des enjeux matériels et de principes
D’après Pierre Ganz, secrétaire du conseil de déontologie journalistique et de médiation, « il y a deux types d’enjeux : un enjeu de principe et un enjeu matériel.” Le premier concerne notamment la liberté d’expression et de la presse, ainsi que le principe de protection des sources. Le deuxième concerne les journalistes eux-mêmes. “C’est comment épuiser des personnes par des poursuites juridiques même si on perd“ , exprime Emmanuel Vir, journaliste au magazine Geo et secrétaire national du syndicat national des journalistes CGT (SNJ-CGT). Cette intimidation peut également amputer les moyens financiers du journaliste ou de sa rédaction. “Les poursuivis sont souvent des journalistes indépendants ou des petits médias qui n’ont pas beaucoup de moyens comparés aux grands groupes qui les poursuivent”, affirme Cécile Dolman.
Cécile Dolman finit en développant que les enjeux des procédures-bâillons, aux yeux de l’Ofalp, sont “de les définir en droits et de définir un cadre qui permet de les limiter et de mieux protéger les acteurs du débat public qui sont victimes de ces procédures”. Pour le moment, il n’existe qu’une définition officielle en France, qui semble obsolète aux yeux des journalistes.