Vendredi 8 Janvier, le bus de l’équipe de football du Togo était la cible d’une terrible fusillade. L’attentat a eu lieu alors que  »les Éperviers » pénétraient dans l’enclave angolaise de Cabinda, où ils devaient disputer leur premier match de la Coupe d’Afrique des Nations.

L’équipe de football du Togo ne dispute pas la phase finale de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) qui se déroule en ce moment même en Angola. Emmanuel Adebayor et ses compatriotes ont en effet été victimes d’un terrible attentat qui a fait au moins deux morts. Selon le récit des joueurs et de leur encadrement, la fusillade a duré environ une trentaine de minutes. Ils saluent unanimement l’attitude du chauffeur qui, bien que sévèrement blessé, a eu la présence d’esprit de laisser le bus avancer sur plusieurs centaines de mètres. Un réflexe salvateur, puisqu’il a sans doute permis d’éviter un bilan encore bien plus lourd.

 L’émotion et la colère passées, vient le temps des interrogations, et elles sont nombreuses. Cet attentat était-il prévisible ? Les mesures de sécurité étaient-elles suffisantes ? Fallait-il maintenir la compétition ? Faut-il s’inquiéter pour le déroulement de la prochaine Coupe du Monde, qui doit se dérouler cet été en Afrique du Sud ?

 Volonté sécessionniste

 L’attentat a été revendiqué par le  »Front de Libération de l’Enclave du Cabinda », quelques jours après la fusillade mortelle. Les membres de ce mouvement revendiquent une indépendance par rapport au pouvoir central angolais. Il n’est aucunement question ici de revendications d’ordre tribales ou de reconnaissances d’identité propre. L’objectif sécessionniste a pour but de disposer des énormes ressources pétrolières du territoire du Cabinda, qui représentent tout de même 60% de la production nationale angolaise. Le conflit a donc une origine économique, le désir de profiter de la rente des matières premières locales.

 La zone est en proie à de vives tensions depuis plusieurs années. Le nombre de militaires au mètre carré y est l’un des plus élevés du continent africain. La probabilité que s’y déroule un attentat de ce genre était par conséquent assez élevée. Les autorités locales rejettent toute responsabilité, affirmant qu’ils avaient vivement recommandé à la délégation togolaise de se rendre dans l’enclave du Cabinda en avion et non en bus. Il n’empêche, il semble incompréhensible qu’un tel attentat se soit déroulé au nez et à la barbe des forces de sécurité angolaise, et ce pendant plus d’une demi-heure.

 Quid de l’Afrique du Sud ?

 Après cette attaque, certaines personnalités des mondes politique et sportif avaient demandé le report voire l’annulation de la Coupe d’Afrique des Nations. Refus catégorique des autorités angolaises et des responsables de l’organisation de la compétition. Show must go on. Argument numéro un : ce serait donner raison aux terroristes, récompenser et encourager les assassins. Le football, en tant que sport majeur en Europe et en Afrique, est une vitrine politique et médiatique. Le monde entier connaît dorénavant l’enclave de Cabinda et son  »Front de Libération ». Ce sport, vue son énorme exposition, risque donc fortement d’être à nouveau la cible de ce genre d’événements.

En juin prochain doit débuter la prochaine Coupe du Monde de football en Afrique du Sud, la première organisée sur le sol africain. La question mérite alors d’être posée : faut-il également maintenir cette compétition ? Le pays de Nelson Mandela est connu pour être relativement violent et le théâtre de nombreux meurtres par armes à feu. Mais la situation n’est pas du tout comparable avec celle de l’Angola. L’Afrique du Sud est la cible de violences urbaines engendrées notamment par la pauvreté, et non de violences politiques.

Thomas REMY