Depuis deux mois, les vélos électriques GraouLib’ sont en service à Metz.
Entre enthousiasme, petits dysfonctionnements et ajustements encore nécessaires, usagers et agents de terrain dressent un premier bilan de ce nouveau dispositif.
Cet après-midi-là, devant une station GraouLib’ proche du campus du Saulcy, Madiha souffle de
frustration. Elle tente en vain de débloquer un vélo via l’application. Ce n’est pas la première fois
que ça lui arrive.
« Ce qui m’énerve, comme là, c’est que parfois, l’application me dit qu’un vélo est en
maintenance, mais je dois d’abord détacher celui-ci avant d’en prendre un autre. Et parfois, la
borne est pleine, je dois aller à la suivante. On perd l’avantage du gain de temps », déplore-t-elle.
Pourtant, cette fidèle utilisatrice ne boude pas son plaisir.
« Je l’utilise six fois par semaine. Le GraouLib’ me rend libre, je ne dépends plus des horaires
des transports en commun. Et tant que les 10 premières minutes sont gratuites, ça me coûte moins
cher que le bus. »

Des débuts prometteurs, malgré quelques couacs
Alerté par la situation de Madiha de l’autre côté du trottoir, Jordan, agent de terrain polyvalent,
traverse pour résoudre le souci. Il connaît bien ce type de panne :
« Ce sont des petits problèmes d’usure : freins à resserrer, selles qui bougent, pneus un peu usés,
ou comme là, le vélo qui ne se débloque pas. Mais c’est bon signe, ça prouve que les vélos sont
utilisés régulièrement », explique-t-il en débloquant le vélo.
Quant au succès global de GraouLib’ après deux mois, Jordan se montre confiant :
« Ce n’est pas un flop du tout, surtout autour de la fac, ça bouge beaucoup. Je suis venu deux fois
aujourd’hui à cette station, une fois pour remettre des vélos, une autre pour en retirer parce qu’il
n’y en avait plus assez ou qu’il y en avait trop. »
Vincent, gérant du magasin Cyclostorycity à Metz et spécialiste du vélo, résume bien la logique
de ce type de vélo :
« Ils ne sont pas faits pour rouler une heure, c’est pensé pour faire 10 minutes, un petit saut de
puce dans la ville. »
Plus de 1 500 utilisateurs
Sur les réseaux sociaux, Christophe Prévost, conseiller métropolitain en charge du plan vélo,
salue un « véritable succès ».
Selon la Métropole de Metz, 1 762 personnes ont utilisé le service en seulement deux semaines,
totalisant 5 987 trajets. Cela correspond à environ 21 000 kilomètres parcourus, 1 995 heures
passées en déplacement, soit une moyenne de 412 trajets par jour.
Une demande forte et localisé
Parmi les utilisateurs réguliers, certains profitent du service dès leur arrivée à Metz. C’est le cas
d’Amine, 23 ans, étudiant en alternance à Paris, qui rentre chaque week-end dans sa ville natale.
Ce vendredi soir, il sort de la gare avec un sac à dos. D’un pas rapide, il file vers la station
GraouLib’ située juste en face du parvis. En quelques secondes, il déverrouille un vélo via son
smartphone, glisse son sac dans le panier, et enfourche le vélo avec une aisance de pro.
« Quand j’arrive à Metz le vendredi soir, je prends direct un vélo à la gare pour rentrer chez mes
parents. En 10 minutes je suis chez moi, c’est rapide. »
Pour lui, les 10 minutes gratuites sont un vrai atout : « C’est pratique et économique. Mon trajet
est court, donc je ne paie rien. »
Habitué du trajet, Amine connaît bien les bons réflexes pour trouver un vélo dispo rapidement.
Mais parfois, l’expérience se complique : « Le vendredi soir, il n’y a plus de vélos, ou alors ils
sont en mauvais état. C’est un peu la loterie. »
Il pointe un besoin d’amélioration sur les points stratégiques : « Franchement, j’aimerais bien que
la station de la gare soit mieux équipée, plus de vélos, parce que c’est là qu’il y a le plus de
passages. »
Une extension progressive et attendue
Si les débuts semblent encourageants, des limites apparaissent déjà : bornes saturées, vélos
indisponibles, ou stations encore trop peu nombreuses.
« On est encore en phase de test », rappelle Jordan. « Mais la semaine dernière, la ville a rajouté
trois bornes. Bientôt, 56 stations seront réparties dans toute la ville dans les prochains mois. »
L’offre actuelle comprend une vingtaine de stations, concentrées au centre-ville, avec 150 vélos
électriques. À terme, plus de 350 vélos circuleront à Metz, mais aussi à Montigny-lès-Metz,
Marly, Woippy, Moulins-lès-Metz…
Un modèle économique encore à roder
Du côté des tarifs, la stratégie de lancement repose sur une offre incitative : chaque trajet
bénéficie de 10 minutes gratuites jusqu’au 31 mai 2026, une formule qui séduit des usagers
comme Madiha, qui utilise GraouLib’ pour ses trajets quotidiens sans frais.
« Mon trajet dure neuf minutes. Tant que c’est gratuit, je continue. Le jour où ce n’est plus le cas,
je comparerai avec l’abonnement Le Met’ »
Passé ce délai, le tarif est de 0,08 €/minute, avec la possibilité de souscrire un abonnement à
10 €/mois ou 100 €/an incluant 30 minutes gratuites par trajet (à condition de respecter un délai
de 20 minutes entre deux locations). Les 14–26 ans bénéficient d’un tarif réduit à 5 €/mois ou
50 €/an. L’application GraouLib’ permet de localiser un vélo, de le réserver, de le déverrouiller
via Bluetooth, et de suivre son itinéraire grâce au guidage GPS intégré.
Reste à voir si ce modèle tiendra dans le temps.
Une réponse attendue à une demande forte
Avec GraouLib’, Metz tente un retour du vélo en libre-service après l’échec d’Indigo Weel en 2020. Cette fois, la Métropole a fait appel à l’entreprise Fifteen, déjà présente à Marseille ou
Épinal. Les vélos sont connectés, bridés à 10 km/h en zone piétonne et à 20 km/h ailleurs, avec
un verrouillage et une réservation via smartphone.
Deux mois après le lancement, l’enthousiasme est palpable, malgré quelques accrocs techniques
et une couverture encore incomplète du territoire messin.
GraouLib’ n’est pas encore parfait, mais son démarrage semble bien engagé. Reste à transformer
l’essai sur le long terme.