Samedi 15 novembre, le club de football américain des Artilleurs de Metz affrontait le football américain des armées dans un match de gala exceptionnel. L’occasion parfaite pour interroger Éric Geoffroy, le président des Artilleurs, et membre de la ligue Grand Est de football américain sur la visibilité de ce sport à l’échelle locale et ses stratégies de développement au niveau national.
Depuis quelques années, le football américain est de plus en plus suivi en France. Cet engouement télévisuel se ressent-il également sur le terrain ?
Oui, parce qu’il y a beaucoup plus de médiatisation. Aujourd’hui les gens qui viennent connaissent mieux les codes du foot us qu’il y a dix ou quinze ans. Il y a un mouvement de popularisation du foot américain qui ne passe pas que par les séries comme c’était le cas avant. Les droits télés en France aident à cette popularisation.
Qu’est-ce qui pousse les gens à s’inscrire selon vous ?
Plusieurs choses. La première c’est le folklore avec un sport que beaucoup ne connaissent pas. Il y a aussi l’équipement atypique avec les casques, les épaulières etc. C’est souvent un test pour des anciens sportifs (venant du rugby ou autre) qui veulent découvrir autre chose. Enfin, le côté sport de contact pour certains qui veulent « se prouver quelque chose ».
Comment une petite structure comme celle des Artilleurs arrive-t-elle à se faire connaître ?
Le premier moyen, c’est les réseaux sociaux. A l’aide d’un questionnaire, je me suis rendu compte que soixante-dix à soixante-quinze pourcents des gens qui venaient chez nous avaient entendu parler du club sur les réseaux sociaux (sur Instagram et Facebook notamment).
Nous agissons principalement sur le secteur de Metz-Métropole. Ce qui ne nous empêche pas d’aller voir plus largement en Moselle. Il n’y a que deux clubs dans le département et nous sommes le seul qui propose du football américain.
Il y a aussi un côté politique. Les Artilleurs de Metz est une association donc nous avons quand même une mission de promotion de valeurs sportives, de sport-santé, d’inclusion, etc. Cela fait qu’on se doit de participer à la vie sociale de Metz. Nous avons notamment participé à Metz plage cet été. On essaie aussi de s’inscrire au maximum aux événements faits par les comités olympiques départementaux ou régionaux. Tout ce qui est forum des associations restent des moments forts pour nous. Et bien sur des événements comme celui d’aujourd’hui sont des occasions à ne pas manquer !

Justement, vous avez également un mandat au sein de la fédération française de football américain, ainsi qu’au sein de la ligue Grand Est de football américain. Quels moyens sont mis en place pour favoriser l’essor de cette discipline ?
Les deux disciplines les plus porteuses pour le milieu sont le flag football et le cheerleading. Le foot américain reste stable, mais dans les trois disciplines il y a une difficulté partagée qui est la jeunesse. Notre rôle est donc de favoriser la pratique chez les jeunes. Ça passe notamment par de nombreux partenariats, par exemple avec les FFCO (Fédération Française de Sports Collectifs). Il y a des discussions avec les USEP (union sportive de l’enseignement de premier degré), et des fenêtres sont ouvertes avec les universités en STAPS (licence de sciences et techniques des activités physiques et sportives).
L’idée est de pousser le flag football qui est discipline olympique en 2028 à Los Angeles, et qui est très facile à mettre en place dans toutes les situations scolaires et périscolaires. La stratégie est de créer des cycles de flag dans les écoles, les structures qui s’occupent du temps périscolaire etc. C’est l’axe principal de travail dans nos instances.
Cela veut dire que le foot us traditionnel attire moins les jeunes ?
Pas tant que cela, parce qu’on a constaté l’arrivée d’une nouvelle génération. Ce qui nous a manqué c’est la génération qui aurait dû pratiquer de 2000 à 2010. Aujourd’hui, cette génération devrait être dans la partie encadrement et administration des clubs. Il y a eu une petite cassure qui fait qu’il y a un manque de passation avec la génération qui a fondé le football américain en France dans les années 80-90. Heureusement, il y a la génération qui a commencé à pratiquer après 2010 qui commence à reprendre les rênes, ce qui fait qu’on a beaucoup de personnes qui comprennent la problématique qu’on a dans notre sport et qui est encline à la diffuser auprès de la jeunesse.

Pourquoi le flag football est un bon moyen de découvrir ce milieu ?
Déjà le foot américain est un sport de nombre, de spécialistes, ce qui fait que les équipes peuvent monter jusqu’à cinquante joueurs. Nous, par exemple, n’avons pas autant de joueurs, mais pour commencer à faire quelque chose de correct, il faut trente joueurs. Au flag, sept suffisent. Donc rien qu’au niveau du nombre de personnes pour monter une association, c’est beaucoup plus simple.
Ensuite, il y a la mixité hommes-femmes. C’est possible de jouer en même temps et chez les petits c’est plutôt pratique pour la mise en place de ce genre de cycles [à l’école, ndlr]. Et comme il n’y pas de plaquages, il n’y a pas cette dimension d’être costaud, c’est un sport d’évitement qui va se concentrer sur la technicité, l’agilité, etc.
Pour revenir à la vie des Artilleurs, comment s’organise le championnat au vu du peu d’équipes dans la région ?
On est répartis avec d’autres équipes du Grand Est dans un groupe où on joue huit matchs. Selon notre nombre de victoires, on peut décrocher une place en « playoffs », les phases à élimination directes jusqu’à la finale. La principale contrainte reste le kilométrage. Nous sommes obligés de nous déplacer assez loin pour jouer, comme à Nancy ou Strasbourg par exemple.
N’est-ce pas trop difficile financièrement ?
C’est là où nous sommes limités, car on ne peut pas prendre en charge les déplacements. On essaie de rembourser au fur et à mesure les péages par exemple et on pratique beaucoup le covoiturage, mais il n’y a pas de bus pour emmener les joueurs. Dans tous les cas, c’est une problématique qui est commune à beaucoup d’autres sports, surtout au vu du contexte actuel de baisse générale des budgets dans le sport.
Si vous aviez un souhait pour le football américain dans les années à venir, que ce soit au niveau du club, de la fédération ou en France en général quel serait-il ?
Au niveau du club ça serait d’atteindre les deux cents licenciés d’ici 2028 et majoritairement porté par les jeunes, donc de U7 à U15/U18.
Pour le foot us dans la ligue au niveau Grand Est ça serait d’avoir cinq ou six clubs de plus pour réduire les distances de déplacement.
Et pour le foot us en général ça serait un match de NFL à Paris. A un moment donné il va falloir que ça passe par chez nous !
Les Artilleurs de Metz ont joué leur premier match de championnat ce samedi 29 novembre à vingt heures, face aux Black Hawks de Messancy au stade Yacine Cherradi à Metz. Une confrontation remportée largement 49-0 par le club messin.