Plasticien, théoricien, danseur, chorégraphe, scénographe et décorateur, Oskar Schlemmer est inclassable. Rendre compte de toutes les facettes de l’artiste a été un véritable défi pour son petit-fils. C. Raman Schlemmer est également commissaire de la rétrospective L’homme qui danse, fruit d’un projet mené sur plus de dix ans.

L’entrée dans l’exposition se fait par un sas d’or et de noir.  Les visiteurs s’y retrouvent confrontés au gigantesque visage géométrique du logo de l’école du Bauhaus, dessiné presque cent ans auparavant par Oskar Schlemmer.
De 1920 à 1928, il y était professeur de peinture puis décorateur et scénographe. L’école allemande, devenue un courant, est connue pour avoir été d’influence majeure dans l’architecture et le design, mais aussi dans les arts plastiques, la photographie, le stylisme et la danse. Fermée en 1933 par les nazis, l’école est dissoute, et de nombreux artistes et professeurs fuient aux Etats-Unis. Parmi les enseignants figuraient des cadors de l’histoire de l’Art comme Wassily Kandinsky, Paul Klee, László Moholy-Nagy ou Marcel Breuer.

Le Logo du Bauhaus, dessiné en 1922 par Oskar Schlemmer
Le Logo du Bauhaus, dessiné en 1922 par Oskar Schlemmer

L’immersion dans le monde de rigueur géométrique et de vivacité des formes de l’artiste est totale une fois l’antichambre passée. L’immense galerie 2 du musée est ouverte en un seul espace où les volumes forcent la perspective et créent un équilibre parfait.

Si l’alchimie est réussie, c’est en partie parce que le visiteur n’est pas contraint par un sens de visite et peu musarder comme il l’entend. Il n’existe pas de barrières entre les médiums, qui se mélangent et se lient logiquement.

L’espace est ouvert, mais est néanmoins virtuellement compartimenté. 
Le centre est occupé par une estrade sur laquelle se dressent magistralement  les costumes du Ballet Triadique, Œuvre fondamentale du Bauhaus dessinée et mise en scène par Oskar Schlemmer, qui y endosse lui-même un personnage.
Sur les murs se côtoient esquisses de costumes, de maquillages, de scénographies et inspirations de l’artiste. On y retrouve donc entre autres des œuvres des allemands Paul Klee et  Albrecht Dürer.
Le clair-obscur de la salle met en valeur les matières et fait ressortir les masques raffinés de bronze, d’argent et d’or des Danses du Bauhaus.

Célèbre pour ses costumes, le ballet triadique est une création fondamentale du Bauhaus.
Célèbre pour ses costumes, le ballet triadique est une création fondamentale du Bauhaus. Photo: Anna Carolina Collela.

La mise en scène passe par toutes les phases, du sombre « flippant mais joli » selon un tout jeune visiteur, à la tendresse colorée et au retour en enfance. Elle souligne que Schlemmer s’était essayé à tout avec brio.

Mêlant recherche formelle autour du corps, décalages géométriques, et  mobilité dans l’espace, cette rétrospective est une réussite sans conteste. À voir au Centre Pompidou-Metz jusqu’au 16 janvier 2017.

 


À la base de l’exposition Oskar Schlemmer, des querelles et une amitié

Si l’œuvre d’Oskar Schlemmer  se retrouve à Metz, c’est parce qu’Emma Lavigne, directrice du Centre Pompidou-Metz est amie de longue date avec C. Raman Schlemmer, petit-fils de l’artiste et commissaire de l’exposition. Ce dernier, suite à des querelles familiales qui empêchaient jusqu’alors les œuvres d’être exposées, est désormais propriétaire de 90% de la collection.