Ancienne députée de Meurthe-et-Moselle, conseillère régionale de Lorraine depuis 2004, et Secrétaire d’État à la Famille et à la Solidarité du gouvernement Fillon II, Nadine Morano est aujourd’hui une figure incontournable de la politique. Son franc-parler et ses sorties souvent très remarquées constituent une réelle marque de fabrique. Qu’elle séduise ou qu’elle agace, sa personnalité ne laisse pas indifférent.

Une absence remarquée

Victime collatérale de l’ouverture, Nadine Morano a fini par retrouver grâce aux yeux de Nicolas Sarkozy.  »Oubliée » du gouvernement Fillon I, elle est à présent Secrétaire d’État à la Famille et à la Solidarité. Fonction qu’elle cumule avec celle de conseillère régionale de Lorraine. Et avec celle (bien moins institutionnelle) de porte-flingue du sarkozysme, toujours prête à monter au front si le maître est critiqué. Elle n’hésite pas à dégainer et à faire feu, histoire de conserver une place de choix dans la cour du roi.

 25 Septembre, séance plénière du Conseil Régional de Lorraine. Nadine Morano, la «femme de cœur, qui agit dans le seul but de servir ses concitoyens, sans aucun intérêt personnel» selon Nicole Merlino, conseillère régionale UMP, n’a pas souhaité honorer l’assistance de sa présence. Mme Merlino ne tarit pourtant pas d’éloges à son endroit: «Je la crois très sincère, je suis de tout cœur auprès d’elle. J’ai beaucoup d’admiration pour elle.» Lorsqu’on évoque ses multiples dérapages verbaux, et les critiques acerbes qu’a dû essuyer Nadine Morano (venant de membres de l’opposition mais aussi parfois de l’UMP), le sourire reste de mise: «Si on ne fait rien, on ne peut pas être critiqué.» À méditer… Autre son de cloche auprès de Daniel Béguin (les Verts). Pour lui, «Elle manque de cœur, de profondeur.» Montrant du doigt son individualisme et son carriérisme, «Nadine Morano, c’est quelqu’un qui veut à tout prix exister dans une assemblée. Elle monte des coups», il affirme également qu’elle ne fait pas l’unanimité à droite: «Quand elle prend la parole, ses collègues se mettent la tête entre les mains en poussant des soupirs…» Il dénonce son côté «people» et «bling-bling», qui l’agace autant que son «manque de sérieux et d’assiduité» Effectivement, Nadine Morano brille aujourd’hui par son absence.

 Une personnalité controversée

Sa personnalité est donc pour le moins controversée, et elle intrigue autant qu’elle divise. Tout comme ses prises de position.  »Progressiste » sur des sujets comme l’euthanasie et l’homoparentalité, Nadine Morano défend tout de même avec beaucoup de verve les décisions d’un gouvernement pour le moins conservateur et fortement marqué à droite. Rappelons également son intervention pleine d’à-propos qui avait conféré au débat sur la rétention de sûreté une hauteur rarement atteinte en politique: «Je laisse le soin aux Français de juger le PS qui se met clairement du côté des assassins

Pour Jean-Pierre Louville, président du groupe PS, elle est «avant tout responsable de la politique catastrophique de Nicolas Sarkozy, et venir d’un milieu populaire ne l’exonère pas.» Car Nadine Morano n’est pas une  »fille de », elle est un pur produit de la méritocratie à la française. Elle s’est faite toute seule comme l’on dit, et ne manque pas une occasion de le rappeler. Comme dans le livre de Guy Carlier dont elle est à la fois le sujet, l’héroïne et l’intrigue,  » Nadine Morano: une chanson populaire ». Pour M. Louville, venir d’un milieu modeste n’est pas gage d’honnêteté: «Elle assène des contre-vérités avec tellement d’aplomb que les gens peuvent s’y tromper

À l’inverse, François Guillaume (UMP, ancien Ministre de l’Agriculture et aujourd’hui conseiller régional) qui la connaît depuis une vingtaine d’années, considère que son «tempérament musclé» lui a permis de «faire un excellent travail sur le terrain et à la défense de ses idées; les résultats sont là.» Quant à Roger Tirlicien (président du groupe PC), il est pour le moins dubitatif lorsqu’on lui parle de l’ancienne députée de Meurthe-et-Moselle: «Si elle a fait quelque chose, il faudra me le dire. Elle brasse beaucoup de vent». Elle illustre à ses yeux la  »droite décomplexée » dans la mesure où «elle utilise la peur des gens pour en faire un fond de commerce électoral».

 Nadine Morano crée donc en permanence la polémique, que ce soit autour de sa personne, de ses idées ou de son action. Adorée par les uns, détestée par les autres, elle déchaîne les passions. Et semble ravie d’être à ce point sous les feux de la rampe. Qu’importe que l’on parle d’elle en bien ou en mal, pourvu qu’on en parle… Alors, véritable pointure promise à un bel avenir politique, Nadine Morano ? Ou franc-tireuse condamnée à un passage éphémère ? Là encore, les avis sont tranchés. François Guillaume estime que «cela ne fait que commencer pour elle». Daniel Béguin est bien moins enthousiaste et la met en garde: «Ce n’est pas parce qu’on brille près des étoiles qu’on ne se retrouve pas près du pavé…» Qui a dit que les politiques n’étaient pas philosophes ?

                                                                                       Thomas Remy

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