Adeline et Sébastien sont maraîchers à Metz devant-les-ponts. Pour eux, l’hiver est une saison particulièrement difficile. Surtout cette année car les gelées tardent à arriver, bouleversant le cycle de production. Rencontre, les pieds dans la terre.

« Cultiver des fruits et des légumes dans la région pendant l’hiver ? C’est une question difficile » lance d’un ton blagueur Adeline Tourion, maraîchère depuis 3 ans aux Jardins du Val de Moselle. Avec son compagnon, ils ont décidé de convertir une partie de la production de l’entreprise familiale vers une culture biologique, par convictions. Vert de travail et marteau dans les mains, Sébastien Obriot renchérit, lui aussi tout sourire : « aujourd’hui je fabrique les tables pour arranger le magasin, c’est l’hiver on a le temps ! »

La bonne humeur semble être le remède contre la  « déprime hivernale du maraicher». Car l’hiver, c’est une période creuse. Les fruits et les légumes ne demandent que très peu d’attention pour peu de production.  Preuve en est le peu de verdure sortant de terre dans leur production. « C’est très simple. Quasiment toutes les cultures sont dans les serres. Il y a de la mâche, des radis, du persil et des choux ». Seuls, les choux de Bruxelles et les poireaux, les plus robustes, sont cultivés dans les friches, dehors, bravant le froid.  « Il y a moins de choses à faire dans l’immédiat mais c’est un moment de préparation de la saison : ce qu’on va faire, ce qu’on va aménager, établir le calendrier des rotations, achat des graines, installer les premières cultures qui  peuvent supporter le froid, comme par exemple, les petits pois » détaille Adeline.

Une saison tardive

Le climat de la région a eu raison des producteurs de légumes. Auparavant ceinture maraîchère, la Moselle dénombre aujourd’hui seulement  trois producteurs bio. Des pics de froid et de chaleur ou encore des fortes pluies en passant, cette année, par un hiver qui tarde à arriver, les caprices météorologiques mettent à rude épreuve les nerfs des maraîchers. « La végétation redémarre mais on n’aura de toute façon des gelées et les graines ont besoin d’un temps de froid pour pouvoir rependre une bonne pousse. Mais on n’est obligé d’avancer dans la production. On aura la surprise de voir ce que ça donne au printemps. C’est la nature, et pour elle, ce n’est pas naturel de ne pas encore avoir eu de froid. C’est un cycle » explique la maman de Sébastien, secrétaire de l’entreprise familiale.

D’autres défis devront être relevés à l’arrivée de ces fameuses gelées tardives. A commencer par l’impossibilité de cueillir les légumes lorsque les sols sont gelés, poussant la famille à récolter en avance pour ne pas manquer de provisions dans le magasin de ventes directes. « Paradoxalement, on est obligé de commencer les saisons très tard à cause de ces gelées. Elles nous bloquent complètement » précise Sébastien.

« Sans serre, tu ferais un autre métier »

Le couple se refuse « à faire le poireau » en attendant les beaux jours. Les deux maraîchers  usent de malice pour produire tout de même « un minimum » l’hiver. A commencer par la serre double paroi, la base du métier en bio, leur fierté. Equipée de deux cloisons en plastique, la serre permet d’estomper  les chutes de températures. Une acquisition qui leur a « changé la vie ». Car « sans serre, tu ferais un autre métier pour passer l’hiver ».

L’autre technique, c’est le P17.  Un voile est posé sur les plantations pour les protéger  en cas de grosses gelées hivernales et gagner quelques degrés pour accélérer la production et vendre des légumes en magasin.  « Ce qui nous botte tous, c’est la vente directe. Quand les clients nous disent qu’ils ont gouté nos légumes, qu’ils les ont trouvé trop bons, ça met du baume au cœur » déclare Adeline.  D’autres projets d’avenir ? Le couple n’a pas pour objectif de rester dans la région. « On aimerait aller faire du maraîchage ailleurs, là où il y a du relief, dans les montagnes ». Pas sûr que la météo soit plus clémente avec eux …