L’Université de Lorraine est la première université française à accueillir un laboratoire de recherche dédié aux jeux vidéo. Inauguré le 25 novembre 2014, le « game lab » permet à des chercheurs d’analyser les messages véhiculés par ces nouveaux médias.

Bornes d’arcades, NES, Megadrive, PS3, Wii U… le « game lab » dispose d’une impressionnante collection de consoles. La chambre rêvée de tout gamin féru de jeux vidéo. Pourtant, le but ici n’est pas de se divertir, mais de réaliser des recherches parfaitement sérieuses. Un pari audacieux mené par Sebastien Genvo, premier doctorant français à dédier sa thèse à ces supports.

Le jeu vidéo a longtemps souffert de son image. Perçu comme un loisir pour adolescents boutonneux, il éprouve encore des difficultés à être pris au sérieux. Récemment Canal Plus s’est attiré les foudres de toute une communauté en qualifiant de « sous-genre comique » les compétitions vidéoludesques. Grâce au game lab, Sébastien Genvo compte bien prouver que le jeu vidéo possède sa place en tant que sujet de recherche.

Son concept : les jeux expressifs

« Le cinéma aborde des problématiques sociétales dans des films même grand public. Par exemple Million Dollar Baby parle du sujet sensible de l’euthanasie. Le jeu vidéo se restreint encore dans ses thématiques. » déplore le fondateur du laboratoire. Sébastien Genvo a d’abord suivi des études en cinéma. Selon lui, le jeu vidéo est un moyen d’expression aussi légitime que ce dernier.

Joie, excitation, colère, tristesse, jouer nous procure différentes émotions. « L’idée c’est de créer une plateforme d’analyse des jeux vidéos comme forme d’expression. C’est-à-dire comment ils vont véhiculer un message grâce à la narration. » explique Sébastien Genvo. Finalement, ce qu’appelle le doctorant « jeux expressifs », ce sont des titres en lien avec la réalité quotidienne, qui explorent des problématiques sociales ou psychologiques. Par exemple, le prochain Metal Gear traite du thème des enfants soldats.

Extrait du jeu Metal Gear Solid V : The Phantom Pain
Extrait du jeu Metal Gear Solid V : The Phantom Pain

Mais attention, le chercheur ne va pas jusqu’à classifier tous les jeux dans cette catégorie. Il reconnaît que le joueur peut très bien passer à côté d’une thématique. Le game designer doit alors insister sur son message pour qu’il passe en premier plan.

Un jeu qui pèse

Si Sébastien Genvo a obtenu ses subventions, c’est en partie grâce au poids de l’industrie du jeu vidéo. Le secteur culturel vidéoludique représente 1,7 milliard d’euros en France selon les chiffres du SELL, juste derrière les livres, avec 2,8 milliards d’euros de chiffres d’affaires en 2013. Il est donc temps que la France s’intéresse de plus près à ce nouveau média.

Sebastien Genvo et Dominique Gros
Sébastien Genvo fait visiter le game lab à Dominique Gros

Les enfants naissent aujourd’hui avec une manette dans les mains. Les messages véhiculés par ces supports impactent directement la société. Ils tissent les mécanismes culturels de réflexion et de pensée des nouvelles générations. Ils contribuent même à alimenter certains stéréotypes, comme celui de la femme fragile. Une constatation à l’origine de vives protestations féministes sur le web.

Le Maire de Metz rappelle d’ailleurs l’importance d’étudier les jeux vidéo : « C’est pas le mot jeu qu’il faut retenir, mais toutes les problématiques qu’il y a derrière. ». Dominique Gros compte bien sur le game lab pour renforcer l’attractivité de sa ville.

Sébastien Genvo à propos du gamelab

Découvrez le game lab en photographies

Interview réalisé en partenariat avec Eklecty City