Elle a déjà un petit nom : la BAM. Son objectif, à partir de ce week-end, c’est de s’en faire un grand. La Boîte à Musiques, nouvelle salle de musique actuelles, ouvre ses portes à Metz-Borny. Du côté de la mairie, on espère en profiter pour rentabiliser le Mettis et faire renaître ce quartier excentré réputé difficile. Mais à Metz en Scènes, le rêve serait de se tailler une réputation nationale et stimuler un véritable « écosystème musical » dans la ville.

BAM ! Comme des enceintes qui crépitent pour la première fois. BAM ! Comme le son du très attendu Woodkid qui va faire frémir les tympans de 1200 spectateurs. BAM ! Comme la gifle architecturale face à la la façade blanche monumentale percée de lumières triangulaires dessinée par l’architecte Rudy Ricciotti.

Ça y est, la nouvelle salle de musiques actuelles est ouverte. Avec quinze millions d’euros investis dans le projet et deux ans de chantier, il fallait bien « marquer le coup » : un week-end de trois jours de concerts et d’animations attend les visiteurs les 26, 27 et 28 septembre. Et le premier concert, Woodkid, affiche complet. « Le gabarit de l’artiste est presque trop important pour la salle !, commente Nicolas Tochet, délégué artistique à Metz en Scènes. Mais c’est le bon type d’artiste pour représenter ce que l’on voudrait programmer à la BAM : il a émergé de la scène locale, à Reims, il y a quelques années et il mélange pop, électro, orchestration classique… Un bon cross over de musique ».

La programmation de la salle est déjà bouclée jusqu’à décembre. Peter Hook, Yodelice, Chapelier Fou, Chinese Man, Dub Inc… Des noms déjà bien connus qui auraient été à l’étroit dans la petite salle des Trinitaires, en centre-ville, avec ses 450 places. Mais qui seront tout à leur aise dans la Boîte à Musiques. : « C’est une salle modulable de 1200 places debout ou 350 places assises, qui est aussi dotée de studios de répétition. On est sur un gros rythme de programmation : 4 ou 5 dates par semaine, du mercredi au samedi ».

Borny : intégrer un quartier « difficile »

Cela n’a échappé à personne, la BAM a été construite dans le quartier de Borny et non pas au cœur de Metz. Une décision que comprend Nicolas Tochet bien qu’il n’en soit pas à l’origine. Il estime que « le maire a fait un choix citoyen fort ». Le délégué artistique explique qu’il y a une volonté d’intégrer ce quartier « assez difficile, avec un taux de chômage considérable », au reste de la ville.

« Implanter un équipement qui peut être considéré comme luxueux à Borny peut inciter les gens à y venir »

Ce dernier salue l’initiative car, selon lui, elle permettra de démythifier le « côté zone » de Borny.

L’intégration de Metz Borny participe aussi au développement du transport en commun. Le Mettis y circule jusqu’à minuit et le trafic devrait être renforcé les soirs de concert d’après Nicolas Tochet. Il déclare également que cette ligne de bus a déjà changé « l’apparence du quartier. Il y a de grandes ouvertures et des aménagements urbains ». A noter aussi que l’absence de parking à la BAM force les personnes voulant s’y rendre à utiliser les transports en commun. Quant à ceux qui voudront malgré tout prendre leur voiture, ils devront se contenter des places de stationnement de la grande surface à proximité ou d’un parking payant.

Un public vieillissant

Le slogan improvisé par Nicolas Tochet pour la BAM se retient facilement : « Toutes les musiques pour tous les publics ». Autrement dit, la nouvelle salle de concert est ouverte à tout le monde. Pourtant, comme le remarque le responsable artistique, le public des musiques actuelles vieillit. Il explique cela par une institutionnalisation des salles de diffusion. « Ce ne sont plus des squats comme cela pouvait l’être il y a 25 ans. Aujourd’hui ce sont des salles avec de labels nationaux. Quand on est jeune, on va voir des concerts n’importe où. A 35 ans, on va dans des salles à condition que le son ne soit pas trop fort et qu’il y ait un bar à la sortie » résume-t-il avec un brin d’humour.

  Il insiste tout de même sur la pluralité du public. « On ne cible personne sinon l’amateur de musique actuelle. On va dans tous les registres : reggae, électro, hip hop…etc. ». Le délégué artistique compte développer une complémentarité entre les trois salles de concerts de Metz en Scène (Les Trinitaires, la BAM et l’arsenal). Il espère que « le public pourra naviguer de l’une à l’autre ». Nicolas Tochet souhaite d’ailleurs atteindre les 50.000 spectateurs par an.  

Vers un écosystème musical local

Avec une programmation audacieuse et éclectique, la BAM illustre le renouveau culturel de Metz engagé il y a quelques années. Pourtant, avant même son inauguration, elle affiche déjà d’autres ambitions. Avec la baisse annoncée des subventions publiques, l’enjeu premier sera d’ « inventer des solutions et trouver des moyens alternatifs pour continuer à financer cette qualité de service ». Mais pour Nicolas Tochet, il s’agit surtout de « créer un véritable système économique autour de cette entreprise culturelle ».

La structure même de la BAM, avec ses studios de répétition et de création, en fait le tremplin idéal à l’éclosion de la scène messine mais aussi d’une industrie musicale locale. Pour les artistes en devenir, « la chaîne idéale » les verrait passer des petits studios de répétition aux résidences puis aux Trinitaires avant d’enfin atterrir dans la grande salle de la BAM.

Conscient du vivier d’emplois que ce nouvel équipement culturel pourrait générer, le délégué artistique aux musiques actuelles rêve déjà de voir s’implanter ici des labels musicaux, des managers… « C’est indispensable et c’est dans ce sens là qu’il faudra aller dans les années qui viennent », estime Nicolas Tochet. « Non pas juste pour rattraper notre retard mais pour aller plus loin. Perdurer ».