Astroboy, personnage emblématique de la bande dessinée nipponne, revient sur nos écrans avec un long-métrage réalisé par David Bowers. L’occasion de revenir sur la place du robot dans la société japonaise, aux côtés de Marc Caro, réalisateur auteur du documentaire « Astroboy à Roboland », présent au TOTEM de Nancy pour une projection.

Le petit garçon robotisé aux pouvoirs surhumains imaginé par Ozamu Tezuka en 1952 est un véritable symbole de la société japonaise d’après-guerre, qui a fondé tous ses espoirs sur la course à la technologie, en s’appuyant sur l’énergie atomique avec un mélange de crainte et de fascination. Astroboy s’appelle d’ailleurs Atome Boy au pays du Soleil Levant. « Le nucléaire a été vu comme le moyen pour le Japon de rebondir, même si ça peut paraître ambigu » explique Marc Caro.

La popularité du garçon atomique est immense: il devient le premier manga à être adapté en film d’animation, en 1964. Un attachement typiquement nippon: « Le shintoïsme japonais facilite l’acceptation du robot: dans cette religion animiste, les objets ont une âme au même titre que les hommes ou les animaux. Quand on voit l’environnement culturel japonais, on est pas étonnés qu’ils aiment les robots. J’avais l’impression de réaliser un documentaire animalier. ».

« Astroboy à Roboland » met en évidence l’influence d’Astroboy sur les roboticiens japonais: « Je crois qu’il n’est pas si incongru que les artistes inspirent les scientifiques. Dans le même domaine, il n’y a qu’à voir l’influence d’Isaac Asimov. » avance le réalisateur de Delicatessen. On peut voir au cours de son documentaire des robots-substituts d’animaux familiers, le professeur Ichiguro et son clone cybernétique conçu pour expérimenter les relations sociales avec l’homme, ou encore les robots médicaux capables de transporter les patients et de donner l’alerte au moindre signe de malaise. « La population japonaise vieillit rapidement. Il n’y aura bientôt plus assez de jeunes pour s’occuper des personnes âgées. Les progrès en robotique au Japon se font dans le sens d’une harmonisation de la société. Ça a un rôle social. On peut dire qu’ils ont choisi les robots plutôt que les immigrés. ».

Alors que 13 millions de « robots-partenaires » sont prévus dans les foyers nippons d’ici à 2015, comment expliquer la crainte qu’ils suscitent auprès des occidentaux? « En Occident, il y a une certaine méfiance, car les avancées dans ce domaine y ont souvent été exploitées par les complexes militaro-industriels, qui n’existent pas au Japon. ». En effet, l’article 9 de la Constitution, rédigée après de la reddition de 1945, retire au pays le « droit de belligérance », interdisant du même coup le recours à des « forces militaires offensives ».

Signe des temps, l’Astroboy de 2009 ne marche plus à l’énergie atomique, mais grâce au « Blue Core », concentré d’énergie positive et bienveillante, et recentre son message sur le développement durable plutôt que sur une foi sans bornes envers la technologie.