La Première Guerre mondiale s’enseigne dans tous les livres d’Histoire. C’est un sujet inévitable. Elle marque notre passé tout comme notre présent. Lundi 11 novembre, nous avons célébré l’armistice de cette « der des ders ». Face à ce devoir de mémoire mis en avant chaque année, nous vous proposons alors de vivre les tranchées et non de les apprendre. Lucile, vendeuse à la boutique nancéienne La Parenthèse, nous dresse son palmarès des 11 meilleures BD de la Grande Guerre.

1. Putain de guerre ! par Jacques Tardi et Jean-Pierre Verney

C’est l’incontournable bande dessinée. Celle à ne pas négliger. Lucile explique : « Il y a un foisonnement de BDs sur la grande guerre, mais celle-ci, il ne faut surtout pas la louper ». Son dessinateur, Jacques Tardi, a reçu en 1985 le Grand Prix du Festival d’Angoulême. Son style inimitable nous pique au vif. Beaucoup de noir, de gris. Très peu de couleurs. Et s’il y en a une qui ressort, elle s’imprègne de sang. Le héros de son histoire, un soldat sans nom et sans témérité, nous transmet ses pensées, nous téléporte au cœur des tranchées, dans la violence d’une vie menée par les éclats d’obus. Arrêt sur image, plongée et contre-plongée, nous assistons aux événements comme devant un film. Impossible pour le lecteur de s’en sortir indemne, les dessins sont crus et réalistes. La guerre est une boucherie.

*

2. La Grande Guerre de Charlie par Joe Colquhoun et Pat Mills

Publiée par épisode dans la revue britannique Battle entre 1979 et 1986, cette bande dessinée est aujourd’hui rééditée chez Delirium. Malgré les années, cette œuvre du 9ème art n’a rien perdu de sa saveur. Mélange de noir et blanc, de tragédie et de comédie, La Grande Guerre de Charlie se fait le carnet de bord d’un jeune garçon de 16 ans ayant menti sur son âge pour entrer dans l’armée et affronter les Allemands. Sous ses airs de comic américain, cette bande dessinée retrace à travers plusieurs tomes les conditions de vie sur le front, les grandes batailles (Somme, Verdun, Ypres) et la misère. Déclaré comme « une référence dans l’évocation intense de ce grand suicide européen » par le journal La Voix du Nord, cet ouvrage n’a pas fini d’envahir les rayons des librairies.

 *

3. Paroles de Poilus sous la direction de Jean Wacquet 

Adapter en bande dessinée des lettres écrites par des poilus, voilà l’originalité de ce livre. Les éditions Soleil et France Inter ont lancé cette idée afin de rendre hommage à ceux qui, pour protéger leur patrie, se sont sacrifiés. Une vingtaine d’auteurs a été mobilisée et chaque dessinateur s’est retrouvé à illustrer une seule et unique lettre. Face à cet éventail de participants, le risque aurait été de ne pas réussir à hiérarchiser toutes les singularités de style. Pourtant, cet ouvrage est loin d’être un bric-à-brac de souvenirs et de talents. Il y a eu un véritable travail de mémoire. Ne pas oublier ce qui s’est passé, tel était le leitmotiv de cette initiative.

*

*

*

4. L’homme de l’année 1917 par Duval, Pécau et Mr Fab

« Cette bande dessinée a été réalisée dans le cadre d’une série concept », raconte Lucile de la librairie La Parenthèse, « on en trouve d’autres dans le même esprit, comme par exemple L’homme de l’année 1815. » Une date, un humain, une histoire. Pour 1917 et la grande guerre, c’est Boubacar N’Doré, un Ivoirien, qui devient le personnage principal. Ici, nous sommes également au cœur des tranchées mais la particularité de cette BD repose sur ce héros, un soldat noir qui n’a pas eu d’autres choix que de servir et défendre l’empire colonial qui contrôlait son pays. Un point de vue différent qui permet également de dévoiler une belle leçon d’amitié entre un étranger et son sergent français.

*

*

5. Les Seins de café par Jean-Claude Servais 

Exit les tranchées, nous voilà parmi les civils, à la frontière de la forêt ardennaise. Des femmes cachent dans leur corsage du café pour le vendre en contrebande. Victor, un jeune homme plutôt solitaire et réfugié dans une cabane forestière, espionne ce groupe pas comme les autres. Lorsqu’Hélène rejoint l’équipe, il en tombe directement amoureux. Derrière cette histoire romantique, c’est ce petit monde de trafiquants que nous décrit Jean-Claude Servais. L’auteur s’est même inspiré d’un célèbre contrebandier du début du siècle, Victor Droguest. De quoi rendre sa narration encore plus réaliste.

*

*

*

6. Les Godillots tome 1 par Marko et Olier

Les deux auteurs se rejoignent dans la variété de leurs expériences (BD, revues, graphisme…), dans leur attachement à leur région d’origine (le pays Basque pour Marko et le Nord pour Olier) et dans leur sens de l’humour. Et c’est d’ailleurs par ce biais que Marko et Olier ont choisi de traiter ce délicat sujet de la première guerre mondiale, sans rien enlever à la tragédie qu’elle représente. On retrouve donc la vie aventureuse et pleine d’humanité d’une escouade pendant la guerre 14-18. Affrontant un ennemi maudit “le Croquemitaine”, ils vont pourtant faire une incroyable rencontre qui va bouleverser leurs vies.

*

*

[toggle title= »Les Godillots en vidéo »]

[/toggle]

*

7. Pour un peu de bonheur par Laurent Galandon et A.Dan 

Le thème des « gueules cassées » est mis en avant dans cette bande dessinée. Grand phénomène d’après-guerre, il a eu autant d’ampleur que la guerre elle-même. Laurent Galandon s’est penché sur ce fait à travers le personnage de Félix, ancien combattant qui revient chez lui après l’horreur vécue au front. « Arrachée par un obus, la moitié de sa figure est dorénavant cachée derrière un masque blanc. » Comment se reconstruire après ça ? Voici donc le parcours et les déboires d’un homme mutilé physiquement et moralement.

*

*

*

8. La Guerre des Lulus par Régis Hautière et Hardoc

Vivre la guerre à travers le regard des enfants. C’est le pari audacieux qu’on réalisait Régis Hautière et Hardoc dans cette bande dessinée, « La Guerre des Lulus ». Les Lulus ? Ce sont quatre orphelins, Lucas, Luigi, Ludwig et Lucien, qui vont se retrouver malgré eux derrière les lignes des troupes allemandes. Ils vont devoir s’adapter face à un monde qui, tout à coup, s’écroule devant le spectre de la grande guerre…

*

*

*

9. Les Sentinelles par Xavier Dorison et Enrique Breccia 

Place à Robocop à présent ! Xavier Dorison et Enrique Breccia, deux grands noms du 9ème art, nous font vivre cet événement historique à travers des personnages surhumains. Décrits comme des « super-héros radium-punk », ces sentinelles ont été conçues pour que la France soit victorieuse face à l’Allemagne. Indestructibles, ces hommes d’acier nous placent au coeur de la science-fiction. Une autre manière de voir la guerre qui va être bientôt adaptée au cinéma : un long métrage est en effet en projet afin de transposer cette bande dessinée sur grand écran.

*

*

*

10. Le Pilote à l’Edelweiss par Romain Hugault et Yann

Maintenant, nous partons dans les airs. Des jumeaux, engagés tous deux dans l’aviation, craignent un ennemi commun : le pilote allemand Edelweiss. Mais pourquoi ? Qu’a-t-il bien pu se passer ? Avec Le pilote à l’Edelweiss, les deux auteurs ont su aller au-delà du récit de simples frères utilisant leur ressemblance. D’abord par le contexte, celui de la « der des ders », puis par l’indéfectible liberté de ceux tutoyant les nuages et, enfin, par toute l’ambiguïté d’un passé refoulé, constituant un cadre propice à une belle histoire.

*

*

11. C’était la guerre des tranchées par Jacques Tardi

« Il ne s’agit pas de l’histoire de la Première Guerre mondiale racontée en bande dessinée, mais d’une succession de situations non chronologiques (…). Il n’y a pas de “héros”, pas de “personnage principal”, dans cette lamentable “aventure” collective qu’est la guerre. Rien qu’un gigantesque et anonyme cri d’agonie. » Cette citation de Jacques Tardi résume très bien l’esprit de cette bande dessinée. A travers ses dessins, on « vit » littéralement la grande guerre. Empreints d’un réalisme à couper le souffle, cette BD permet de s’imprégner totalement de l’époque et de mieux comprendre ce que les livres d’Histoire ne montrent pas toujours.